27/05/2008

PLAT DU JOUR 8 - Al Green, Milton Nascimento, The Roots, Martina Topley-Bird, Guns N'Roses

Spadee Sam presents - Strugglin' Mix


01 – Guns N’Roses You Ain’t The First (Use Your Illusion 1 1991, Geffen)
02 – The Roots75 Bars (Black’s Reconstruction) (Rising Down 2008, DefJam)
03 – Al Green feat.Anthony HamiltonYou’ve Got The Love I Need (Lay It Down 2008, BlueNote)
04 – Milton Nascimento with Jobim TrioTudo Que Vocé Podia Ser (Novas Bossas 2008, EMI)
05 – Milton Nascimento and BelmondoCançao do Sal (Nascimento and Belmondo 2008, B-Flat Recordings)
06 – Milton NascimentoCravo e Canela (Clube da Esquina 1972, WordlPacific)
07 – Al Green feat.Anthony HamiltonLay It Down (Lay It Down 2008, BlueNote)
08 – Martina Topley-BirdPoison (The Blue God 2008, PIAS)
09 – Martina Topley-BirdSandpaper Kisses (Quixotic 2003, Independiente)
10 – TrickyStrugglin’ (Maxinquaye 1995, Island)


Des mort-vivants, des fantômes, des retours et des départs.

Ou l’on constate avec bonheur, en réécoutant pour la première fois depuis 10 ans les Use Your Illusion des Guns N’Roses, le nombre impressionnant de tubes rock n’roll (Bad Obsession, Pretty Tied Up) écrits par le groupe au début des années 90. Ne venez plus nous gonfler avec Nirvana.

Ces derniers temps, Questlove semblait passer plus de temps la gueule ouverte, donnant son avis sur tout et n’importe quoi, qu’à faire de la musique. Avec le dernier album des Roots, on ne peut pas dire que se remettre au boulot lui ai vraiment porté bonheur, mais au moins l’entend-on jouer de la batterie, ce qu’il fait plutôt bien, comme sur ce 75 Bars direct.
Mais les Roots ont quand même lâché depuis longtemps le wagon de tête des meilleures productions hip-hop.

Avec James Poyser, Questlove s’est également occupé de produire le nouvel album d’Al Green, Lay It Down. Willie Mitchell à la place de Willie Mitchell, l’album pourrait sortir du Studio Royal de Memphis et paraître chez Hi Records. Mais nous ne sommes plus en 1972 et il n’y aurait alors pas eu l'excellent Anthony Hamilton pour donner la réplique au Révérend, qui chante comme s’il avait vingt ans. Hamilton est présent sur Lay It Down, un slow dans le pur style de Green, et sur You’ve Got The Love I Need, à écouter en décapotable, cheveux au vent. Alors tout n’est pas exceptionnel non plus, les apparitions de Corinne Bailey-Rae ou de John Legend tombent à plat, mais c’est un disque d’Al Green, comme on aimerait en entendre encore longtemps.

Une autre légende qui fait l’actualité, c’est le chanteur brésilien Milton Nascimento. Physiquement mal en point, il est pourtant au cœur des disques des frères Belmondo et du Jobim Trio.
Sur le premier, ce sont ses propres chansons qui sont à l’honneur. Emouvant, mais gâché par un orchestre de cordes hollywoodiennes bien sirupeuses.
C’est pour les 50 ans de la naissance de la bossa nova que le chanteur participe au second, en compagnie de Paulo et Daniel Jobim et du batteur Paulo Braga.
Dans les deux cas, c’est un Nascimento fatigué qu’on entend, bien loin des sommets vocaux qu’il atteignait à la fin des années 60 et au début des années 70.
Rappelons qu’avec Clube da Esquina, Nascimento et sa bande de musiciens ont enregistré l’un des plus grands albums pop de l’histoire de la musique, bien meilleur que les trois quarts des albums anglo-saxons habituellement cités dans cette catégorie.

Milton Nascimento with Wagner TisoTravessia
Milton Nascimento with Belmondo Bros. – Maria Maria

La chanteuse Martina Topley-Bird continue elle sa triste marche en arrière.
Dans les années 90, elle était cette sublime voix éraillée, les cordes vocales prises dans les nuages d’herbe que fumait compulsivement son compagnon d’alors, Tricky. C’était les années Massive Attack, puis l’heure du premier album solo du chanteur, et son chef d’œuvre, Maxinquaye. Bien des années plus tard, Martina Topley-Bird est revenue avec Quixotic, qui se tenait plutôt bien, même sans génie. Aujourd’hui, c’est avec un pénible The Blue God qu’elle se présente, et la pochette annonce déjà la couleur. Tiens donc, Danger Mouse est aux manettes. Après Gorillaz, le dernier disque des Black Keys ou le dernier Sparklehorse, le producteur continue lui aussi de montrer que tout ce qu’il touche se transforme en échec artistique. Pas grand-chose à proposer, ni au niveau du son, ni à celui des arrangements, disons-le sans hésiter, le label « produit par Danger Mouse » est une belle arnaque.

Le week-end prochain, on parlera d'un producteur, d'un vrai, de T-Bone Burnett.

21/05/2008

PLAT DU JOUR 7 - T-Bone Burnett, 3 Na Massa, Tribeqa, Tom Waits, Edith Piaf, Kid Creole, Billy Bon Thornton,



Spadee Sam presents - Starlight Lounge Mix

01 – Johnny PateBrother (Title) (Brother On The Run O.S.T. 1973)

02 – 3 Na Massa feat.Leandra LealCerteza (3 Na Massa 2008, NubluRecords)

03 – T-Bone BurnettAnything I Say Can and Will Be Used Against You (Tooth of Crime 2008, Nonesuch)

04 – T-Bone BurnettTear This Building Down (The Criminal Under My Own Hat 1992, Sony)

05 – Dr Buzzard’s Original Savannah BandSunshower (Going Places, The August Darnell Years 1976-1989, Strut)

06 – Tribeqa feat.DajlaBridge The Gap (Tribeqa 2008, Underdog)

07 – Edith PiafLes Blouses Blanches (Olympia 1961)

08 – Tom WaitsAnywhere I Lay My Head (Rain Dogs 1989, Island)

09 – Billy Bob ThorntonStarlight Lounge (Private Radio 2001, Universal)




Un "easy listening" de qualité chez les trois brésiliens de 3 Na Massa, projet électro-erotico-lounge qui s’inspire du travail de Gainsbourg, avec les participations des chanteuses Ceu ou Nina Miranda, cette dernière à l'oeuvre il y a quelques années de cela dans Smoke City, et désormais dans Zeep.


Myspace 3 Na Massa


Quelques mois après avoir produit l’excellent disque du duo Robert Plant/Alisson Krauss, le guitariste-chanteur-producteur T-Bone Burnett publie Tooth of Crime sur le label Nonesuch. A l’origine, des compositions écrites en 1996 pour une pièce de Sam Shepard et enregistré au fil des années avec les fidèles Marc Ribot ou Sam Phillips. Quelques bonnes chansons mais l’album n’est pas au niveau du superbe The True False Identity (Sony) paru il y deux ans.

En 1992, Marc Ribot était déjà un fidèle et sa guitare illuminait Tear This Building Down sur un album au titre génial, The Criminal Under My Own Hat.

Myspace T-Bone Burnett


Future Kid Creole, August Darnell fut d'abord Dr Buzzard. Sur cette compilation qui regroupe certains de ses projets de la fin des années 70 et du début des années 80, on trouve ce magnifique Sunshower, idéal pour les matinées estivales. Et puis à l'heure où le ridicule ne semble pas vouloir tuer à en juger par le succés de conneries comme MGMT, rappelons-nous que bien plus digeste, bien meilleur, bien plus cool en résumé a déja été commis il y a fort longtemps. Ah, ces jeunes!

L'excellente chanteuse Dajla (auteur du très bon Soul Poetry en 2007) et le flûtiste Magic Malik, moins bien vu par ici, sont présents sur Tribeqa, un disque sur lequel vous pouvez largement jeter une oreille.

Myspace Tribeqa

My Space Dajla


C’est dans l’émission de Philippe Meyer, dimanche matin dernier sur France inter, qu'on pouvait entendre Les Blouses Blanches, une chanson incroyable, écrite, pour les paroles, par Michel Rivgauche, et pour la musique, par Marguerite Monnot. En revanche l'interprétation n'est pas terrible...!


A l’affiche du prochain Woody Allen, l’actrice Scarlett Johansson sort également ces temps-ci son album de reprises de Tom Waits (Anywhere I Lay My Head). Un disque totalement sans intérêt et, comme souvent, voir tout le temps, avec les reprises de Tom Waits, mieux vaut se tourner vers l’original, qui l’est déjà tellement qu’il parait vain de vouloir en faire autre chose.


Arte diffusait cette semaine The Barber, le film des frères Coen avec, dans le rôle principal, Billy Bob Thornton. Lui aussi fait partie des acteurs qui chante. Quelques albums de country rock bien américaine et, sur le premier, Starlight Lounge, une belle ballade enfumée à l’ancienne.


Starlight Lounge

17/05/2008

KIP HANRAHAN, ASTOR PIAZZOLA ET LE LABEL AMERICAN CLAVE


Comme promis, passons la vitesse supérieure et intéressons-nous au producteur Kip Hanrahan et à son label American Clavé, alors que paraissent ces temps-ci des rééditions du catalogue, chez Enja Records.


SPADEE SAM presents – Born Anew at Each A.M.Mix

01 – Busses from Heaven (Beautiful Scars 2007, AMCL 1060)
02 – One Casual Song (After Another) (Vertical’s Currency 1984, AMCL 1010)
03 - ....If I Knew How To, If I Knew (Tenderness 1993, AMCL 1016)
04 – Hollywood in Harlem (Every Child Is Born a Poet 2006, AMCL 1032)
05 – Caravaggio / A Quick Balance (Beautiful Scars 2007, AMCL 1060)
06 – Aziz and Azizah (A Thousand Nights and a Night 1996, AMCL 1036)
07 – Leijia Heads to Brooklyn (Beautiful Scars 2007, AMCL 1060)
08 – Milton Cordona (Beautiful Scars 2007, AMCL 1060)
09 – What Else Can I Do With a Drum (Days and Nights of Blue Luck Inverted 1988, AMCL 1012)
10 – Born Anew at Each A.M. (Every Child Is Born a Poet 2006, AMCL 1032)
11 – Gender (Days and Nights of Blue Luck Inverted 1988, AMCL 1012)
12 – A Small Map of Heaven (Vertical’s Currency 1984, AMCL 1010)
13 – Love Is Like a Cigarette (Days and Nights of Blue Luck Inverted 1988, AMCL 1012)
14 – Pretty as Thee (Every Child Is Born a Poet 2006, AMCL 1032)
15 – Shahrazad (A Thousand Nights and a Night 1996, AMCL 1036)
16 – Shahrazad Shifts Angles, Introducing (A Thousand Nights and a Night 1996, AMCL 1036)
17 – Dunya’s Nocturnal Realization (A Thousand Nights and a Night 1996, AMCL 1036)
18 – Shahrazad at The Closing of The First Night of Stories (A Thousand Nights and a Night 1996, AMCL 1036)

Avant de définitivement se tourner vers la musique à la fin des années 70, Kip Hanrahan avait étudié l’architecture puis le cinéma. Deux domaines qui n’ont ensuite jamais cessé de faire partie intégrante de son œuvre, débutée en 1981 avec Coup de Tête et dont la dernière trace à cette heure est l’album Beautiful Scars, paru il y a quelques mois.

Percussionniste, Kip Hanrahan est avant tout producteur. Depuis plus de 25 ans, tous les disques parus sous son nom incluent une quantité impressionnante de musiciens, actifs sur les scènes du jazz/free jazz, de la musique latine ou du rock.

Depuis 25 ans, on a pu entendre sur une quinzaine de disques, et parmi beaucoup d’autres, les guitaristes Arto Lindsay ou Leo Nocentelli (The Meters), les bassistes Jamaaladeen Tacuma, Bill Laswell ou Fernando Saunders, les batteurs Anton Fier, Andrew Cyrille ou JT Lewis, les pianistes Carla Bley, Don Pullen, Mike Cain ou DD Jackson, les violonistes Alfredo Triff ou Billy Bang, les souffleurs Jerry Gonzalez, Henry Threadgill, Byard Lancaster, David Murray ou Ron Blake.

Mais le ciment de l’oeuvre d’Hanrahan, c’est la basse électrique, celle, élastique, de Steve Swallow, ainsi que les percussions magiques et omniprésentes de Milton Cardona, Daniel Ponce, Horacio El Negro Hernandez ou Robby Ameen, les voix de Brandon Ross, Lisa Herman, Alvin Youngblood Hart ou Lindsey Marcus, celles de la cubaine Xiomara Laugart ou encore du gallois Jack Bruce, mythique bassiste du groupe Cream avec Eric Clapton.

Des voix chantées, parlées, murmurées, en anglais, en espagnol.

Tous les disques de Kip Hanrahan se ressemblent plus ou moins, et font entendre une musique faite de plans rapprochées, urbaine, new-yorkaise, cosmopolite, métissée, sensuelle, moite.
Impossible d’écouter un disque d’Hanrahan à la campagne en hiver.

Il fut pendant longtemps difficile de conseiller un disque en particulier parmi la dizaine d’albums publiés sous son nom. Le premier, Coup de Tête, résonne des éclairs de guitare d’Arto Lindsay et cache une merveilleuse reprise d’India Song de Jeanne Moreau et Marguerite Duras, avec Carla Bley au piano et au chant.
Deux and plus tard, Desire Develops an Edge voit l’apparition de deux des éléments les plus importants dans l’œuvre d’Hanrahan, la basse de Steve Swallow et la voix de Jack Bruce.
Si en 1984, sur Vertical’s Currency, il n’y avait eu que ce fantastique Small Map of Heaven… La voix de Jack Bruce y est sensuelle comme jamais, David Murray offrant quant à lui un solo magnifique.
5 ans plus tard, Days and Nights of Blue Luck Inverted en est la sombre suite.
Au même moment, le pianiste Don Pullen, la chanteuse Carmen Lundy et le violoniste Alfredo Triff illuminent Tenderness, avant qu’en 1993, Exotica penche nettement du côté des Caraïbes.
Puis les Mille et une Nuit, et leur libre adaptation par Hanrahan et ses musiciens. Des dialogues nocturnes, intimes, un leitmotiv de piano et toujours de fantastiques percussions.
Et puis, alors que l’on pensait le meilleur derrière lui, voilà que Kip Hanrahan publie Beautiful Scars, où tout est du même niveau que Busses from Heaven ou Caravaggio, notamment One Summer Afternoon, Xiomara wears The Hat Beautifully ou The Accountant of Morning, sur lesquels Alfredo Triff mais aussi le saxophoniste Ron Blake font des merveilles.


N’hésitez pas et courrez acheter Beautiful Scars, vous l’écouterez longtemps, ce qui de nos jours est plutôt rare.






SPADEE SAM presents – Tangologie, an American Clave Mix


01 – Alfredo TriffAmbiente Pa ‘Ti (21 Broken Melodies at Once 2000, AMCL 1023)
02 – Astor PiazzollaTanguedia III (Tango : Zero Hour 1986, AMCL 1013)
03 – Silvana DeluigiAquesto Abajo (Yo! 2002, AMCL 1025)
04 – Alfredo TriffBolero Para Las Memorias (21 Broken Melodies at Once 2000, AMCL 1023)
05 – Deep RumbaArabian Nights (Deep Rumba, A Calm In The Fire of Dance 2000, AMCL)
06 – Silvana DeluigiTangologie (Yo! 2002, AMCL 1025)
07 – Astor PiazzollaKnife Fight (The Rough Dancer and The Cyclical Night 1988, AMCL 1019)
08 – Astor PiazzollaMichelangelo ’70 (Tango : Zero Hour 1986, AMCL 1013)
09 – Astor PiazzollaPrologue (Tango Apasionado) (The Rough Dancer and The Cyclical Night 1988, AMCL 1019)
10 – Silvana DeluigiSonamos el Tango (Yo! 2002, AMCL 1025)
11 – Deep RumbaBesame Mucho (Deep Rumba, A Calm In The Fire of Dances 2000, AMCL 1030)
12 – ConjurePetit Kid Everett (Cab Calloway Stands In For The Moon 1988, AMCL 1015)
13 – ConjureMinnie The Moocher (Cab Calloway Stands In For The Moon 1988, AMCL 1015)

Très vite, Kip Hanrahan créé le label American Clavé afin d’y publier sa musique et celle d’amis comme le percussionniste Milton Cardona, le trompettiste Jerry Gonzalez et plus tard, le violoniste cubain Alfredo Triff.

Y sortent les albums sous son nom mais aussi des projets comme Conjure, qui rassemblent autour des textes d’Ishmael Reed (auteur en 1972 du flamboyant Mumbo Jumbo) certains des musiciens nommés précédemment, rejoints par Taj Mahal, Allen Toussaint, Lester Bowie, Olu Dara ou Bobby Womack, pour trois disques qui brassent toutes les musiques afro-américaines, blues, soul, jazz, free jazz, funk.

Mais American Clavé est surtout le label sur lequel paraissent trois des derniers disques, les meilleurs, d’Astor Piazzolla.

Trois disques en quintet, augmenté sur The Rough Dancer and The Cyclical Night du saxophone alto de Paquito D’Rivera.
Trois disques d’une violence inouïe, sensuels, sexuels.
Sur Tango :Zero Hour, The Rough Dancer et La Camorra, le tango est joué «comme dans un bordel, par des musiciens à moitié ivres qui s’aiment et se détestent ».
Une musique au cordeau, sèche, sans fioriture, où claquent comme un fouet les glissandos rapides du violoniste Fernando Suarez Paz, les contrepoints percussifs du piano de Pablo Ziegler et surtout le bandonéon d’El Troesma, puissant, complexe.
Par leurs extraordinaires évocations des passions les plus extrêmes, ces trois disques tuent pratiquement le tango, devenu, débarrassé de tout folklore, autant blues que soul.
La solitude d’une provocation passionnée…

« Quel pêché a donc commis Astor Piazzolla dans une vie antérieure pour voir depuis sa mort sa musique ainsi massacrée par les musiciens classiques, alors qu’il ne supportait pas la manière qu’avait ces derniers d’essayer, en vain, de la jouer ».
‘Il faut avoir ma musique dans le cœur, dans le corps, avant même que je l’écrive. Avec eux, c’est impossible ».
« Astor assistait à une répétition, réarrangeait le tout de manière à rendre sa musique plus simple rythmiquement et émotionnellement, puis laissait tomber, acceptait les récompenses et sa musique, vide ».
« Depuis sa mort, sa musique est presque exclusivement jouée, vidée, massacrée par des musiciens classiques ».
« L’une des caractéristiques d’Astor Piazzolla est qu’il jouait debout. « Je refuse de paraître comme une veille dame entrain de tricoter ». Chanteur ou saxophoniste, vous parlez, respirer, sonnez différemment en vous tenant debout. Récemment, à Buenos Aires, les jeunes joueurs de bandonéon se tenaient tous assis. Toute la sensualité du jeu de Piazzolla s’était perdue. Et ils ressemblaient à nouveau tous à de vieilles dames entrain de tricoter ».

KIP HANRAHAN

Astor Piazzolla : Milonga del Angel
Astor Piazzolla : Michelangelo 70

Kip Hanrahan poursuivra son travail autour du tango après la mort du maître, en produisant l’excellent Yo!, de la chanteuse argentine Silvana Deluigi, et sur lequel on retrouve presque au complet le quartet qui entourait Piazzolla sur Tango Zero Hour et La Camorra.


Bonus : Quelques suggestions extra-musicales pour accompagner la musique de Kip Hanrahan et du label American Clavé.

En sirotant un mojito, regardez, si ce n’est déjà fait, In The Mood for Love de Wong Kar-Wai, et lisez Los Boys (10/18), le magnifique livre de l’écrivain américain d’origine dominicaine, Junot Diaz.

Vous m'en direz des nouvelles...

15/05/2008

CEDIM PULSE FESTIVAL, 2ème Soir à l'Artichaut, mercredi 14 mai 2008 avec Zakrya, Primal Band, L'Ensemble du Prince Oreille

Spadee Sam presents - No Me Llores Mas Mix


01 - Arsenio Rodriguez - No Me Llores Mas
02 - John Zorn - Moadim (Filmworks XIV, Hiding and Seeking 2003, Tzadik)
03 - Cassandra Wilson feat.Brandon Ross - The Chosen (The Spirit Music Jamia, Dance of The Infidel 2005, UniversalJazz)


Le hasard fait parfois bien les choses. A moins que ce ne soit un coup de fil à un ami.

Celui qui vous invite à vous rendre à l’Artichaut, mercredi 14 mai, pour assister à l’une des soirées du Cedim Pulse Festival, (Centre d'enseignement et de développement de l'improvisation musicale) qui se déroule jusqu’à dimanche dans ce bar de Strasbourg.

Une fois sur place, les élèves de l’atelier Passage, dirigé par Vincent Posty et Lior Blindermann jouaient, plutôt bien, des pièces de John Zorn, Filmworks XIV (Hiding and Seeking), avec chanteuse (Emmanuelle Zanfonato), contrebasse (Adam Lanfrey), basse électrique (Lionel Mullot), batterie (Yann Gall) et oud (Théophane Hospital). A la conclusion de cet apéritif, No me Llores Mas d’Arsenio Rodriguez, version Marc Ribot et ses Cubanos Postizos.

Puis, l’Ensemble du Prince Oreille. Violoniste-chanteuse (Aline Haelberg), contrebassiste (Rémy Daviau), percussionniste (Julien Gutbier) et guitariste (Fabien Bucher).
Un concert d’excellente facture, où les mélodies fluides prenaient appui sur des ostinatos rythmiques entêtants. Un parfait équilibre de groupe et une musique festive qui ne tombait jamais dans la facilité. De très bons musiciens également avec une mention spéciale au guitariste Fabien Bucher. On aimerait entendre plus souvent l’Ensemble du Prince Oreille.

Faites vous votre avis en les écoutant ici : http://www.myspace.com/ensembleduprinceoreille


Au caveau, Primal Band leur succédait. Initié par le saxophoniste David Florsh (Ozma), le contrebassiste Vincent Posty (tous les groupes jazz de Strasbourg ?!) et le pianiste Christophe Imbs (Christine Clément Polaroïd4), ce projet a pour ambition de réunir un maximum de musiciens de la scène jazz locale autour d’une musique autant écrite qu’improvisée.
Chaque musicien, ou presque, dirigeaient à tour de rôle une de leur composition. Les qualités d’écriture et de direction de Christophe Imbs, David Florsch, Yves Weyh, Vincent Posty ou Pierre Michel ont ainsi été mises en valeur de belle manière. En plus des trois musiciens cités plus haut et du saxophoniste Pierre Michel, le trombone de Pascal Beck, la trompette de Fred Bocquel, la clarinette et la voix de Sylvie Brucker, la batterie de Pascal Gully et l’accordéon de Yves Weyh étaient à entendre dans ce projet ambitieux et passionnant qui n’en est qu’à ses tout débuts.

Enfin, le gros morceau de la soirée était le concert de Zakarya. On connaît l’histoire, Zakarya est le seul groupe français à être signé sur le label Tzadik de John Zorn. Trois albums ont paru depuis 1999 et s’ils sont tout les trois excellents, notamment le dernier sur lequel on note la présence de la guitare de Marc Ribot, rien ne laissait présager de l’intensité du set qu'ils allaient offrir ce soir.
Rock, free jazz, klezmer oriental, un son énorme, des compositions, celles qui figureront sur leur prochain disque, toujours plus compactes et surtout des musiciens impressionnants. A l’accordéon, Yves Weyh, aussi à l’aise dans les dissonances les plus marquées que dans les passages les plus mélodiques. A la guitare, précis et doté d'un son magnifique, Alexandre Wimmer. Comme à son habitude, la rythmique Vincent Posty/Pascal Gully fut remarquable, le premier distribuant violemment ses accords de basse, le second tirant de sa batterie un son à la fois puissant et ouaté.
Invité par le groupe sur deux morceaux, Lior Blindermann a quant à lui pris un fantastique solo d’oud, tout en silences suspendus et entrées hors temps, accompagné par la rythmique Posty/Gully.
Autant dire que le prochain disque qu’enregistre Zakarya cet été est d’ores et déjà attendu avec impatience. En attendant, on les retrouvera à Jazz à Mulhouse le 27 août 2008, dans la salle du Noumatrouff.

Des moments comme la musique, et le jazz en particulier, arrive à en offrir à qui sait recevoir.
Soyez curieux, allez aux concerts, bouffez tout comme disait Oswald de Andrade.

Bonus : Le morceau Windsleepers sur le myspace de Polaroïd4, le quartet de la chanteuse Christine Clément, est superbe.

13/05/2008

PLAT DU JOUR 6 - Estelle, Willy Deville, Eric Bibb, Mark Lanegan, James Pants, Pär Lämmers, ...

Spadee Sam presents – Stars That Speak Mix (clique gauche pour l'audio)

01 – The SolutionHad You Told Him Like It Is (Wouldn’t Be Like It Is) (Will Not Be Televised 2008, WildKingdom)
02 – Eric BibbSpirit I Am (Get On Board 2008, Telarc)
03 – Estelle feat.Cee-LoPretty Please (Love Me) (Shine 2008, Atlantic)
04 – James Pants feat.Deon DavisKash (Welcome 2008, StonesThrow)
05 – Mike DoughtyMore Bacon Than A Pan Can Handle (Golden Delicious 2008, Ato)
06 – ChairliftAt My Side
07 – Vampire WeekendCape Cod Kwassa Kwassa (Vampire Weekend 2008, XI)
08 – EstelleCome Over (Shine 2008, Atlantic)
09 – Aqeel Cosmic Psycho (Inside The Man of and Afro-American Ange 2008, DelPialo)
10 – Kissey AsplundCaos (Plethora 2008, BBE)
11 – Isobel Campbell and Mark LaneganThe Flame That Burns (Sunday at Devil Dirt 2008, Pias)
12 – Willy DevilleStars That Speak (Pistola 2008, Eagle)

Quantité de bonnes chansons perdues dans un océan d’albums à moitié (plus ?) vides.

Dans la mouvance soul/funk rétro actuelle, les suédois de The Solution proposent Will Not Be Televised qui puise allègrement aux sources des labels Stax et Motown. Le son du premier, la pop soul de la seconde pour un résultat pas désagréable, mais pas renversant non plus.

Disons-le une fois pour toute, le blues d’Eric Bibb est ennuyeux comme la pluie. Passéiste en diable, Bibb arrive même à faire mouche avec une parfaite imitation de Joe Cocker ! Profitez donc un maximum du tube Spirit I Am.

John Legend fait de l’excellent boulot sur Shine, le deuxième album d’Estelle, bourré de tubes imparables. Si American Boy, son duo avec Kanye West, fait les beaux jours des gens branchés, celui avec Cee-Lo, l’une des moitié de Gnarls Barkley, est bien meilleur. Et avec Come Over, Estelle signe le morceau parfait pour votre ménage de printemps, toutes fenêtres ouvertes.

Une parfaite ritournelle pop chez Chairlift et un interlude de luxe chez Mike Doughty, ancien membre de Soul Coughing, une tentative hawaio-africaine par Vampire Weekend, c’est maigre on vous l’accorde, mais on prend ce qu’on nous donne et les gens n’ont plus rien.

A Los Angeles, sur l’excellent label de hip-hop Stones Throw, sortent de temps à autres des ovnis électro-psychédéliques. C’est le cas avec Welcome de James Pants, un disque largement dispensable qui l’est nettement moins pour le morceau Kash. Bootsy Collins doit traîner dans le coin. Le remix de Peanut Butter Wolf, patron du label, est encore plus savoureux.

L’ombre d’un ancien pensionnaire de Stones Throw, J Dilla, plane sur la mixtape d’Aqeel, pleines de beats futuristes et de voix p-funk, dont s’inspire largement cet excellent Cosmic Psycho.

La suédoise Kissey Asplund est charmante et a une très jolie voix. Sur Caos, on entend le bruit des vagues. Est-ce à ses côtés que l’on s’est endormi et avons raté le reste de Plethora ?

Le duo cowboy/cowgirl Mark Lanegan/Isobel Campbell revient avec un album bien meilleur que Ballad of The Broken Seas, paru il y a deux ans. On le sait depuis longtemps mais Mark Lanegan est l’une des plus grandes voix actuelles. On n’en dira pas autant de sa charmante partenaire dont les gémissements, même discrets, sont insupportables.
Le sommet de ce Sunday at The Devil Dirt est le fantomatique et sudiste Back Burner, qui aurait tout à fait pu figurer sur Pistola, le dernier Willy Deville. Back Burner / I’m Gonna Do Something The Devil Never Did, même combat. Mais chassez le romantisme et il revient au galop et c’est à une fin de nuit enfumée en compagnie de mariachis ivres que nous invite, comme souvent, Deville, sur Stars That Speak.

Au rayon jazz, allez faire un tour sur le myspace du pianiste néerlandais basé à Berlin, Pär Lämmers. En trio, il vient de publier Hinten rechts, der Regen, sur le très bon label allemand Traumton Records. Le morceau Krank, par exemple, vaut le détour et tout l’album évolue au même niveau. Les trois excellents musiciens affichent clairement leurs intentions pop (une reprise du merveilleux Between The Bars d'Elliott Smith) mais jamais ne tombent dans la facilité, ni mélodique ni ryhtmique. Pär Lämmers pourrait en tout cas bien vite devenir un pianiste dont on parle, d'autant que les échos qui nous sont parvenus des performances du trio en concert sont plus que positives.

05/05/2008

ART DISTRICT au Café des Anges de Strasbourg, le 04/05/2008




Dimanche 4 mai, Art District donnait un excellent concert au Café des Anges de Strasbourg.

Ses cinq membres faisaient entendre un hip-hop acoustique dont les influences se situeraient du côté des Roots, de Mos Def ou du Wu-Tang Clan, un morceau de ses derniers était d'ailleurs repris pendant leur set.
Mais loin de vouloir marcher à tout prix dans les pas de ses illustres aînés, Art District se distinguait par des morceaux très bien écrits et un son bien à lui.

A l’origine de ce dernier, trois excellents musiciens qui constituaient la ligne arrière du groupe. Soit un batteur aussi à l’aise dans les tempos les plus modérés que dans les accélérations broken beat, un bassiste idéal dans sa manière de distiller d'efficaces lignes de groove, et un claviériste dont les interventions jazzy se sont avérées aussi discrètes qu’essentielles. Si celles citées plus haut sont évidentes de par leur filiation directe avec l’univers du hip-hop, une autre de leurs influences pourrait être le pianiste Thelonious Monk, dont Napoléon Maddox, leader de la formation IsWhat?, faisait lui aussi mention lors de son passage au festival Jazzdor 2007.
Parfaitement soutenu par ce backing band de luxe, la ligne de front était quant à elle formée du human beatbox Rhum One et du chanteur Eli.

Le premier a progressivement fait étalage de sa remarquable précision technique. Chacune de ses interventions ont ainsi amené de nouveaux éléments musicaux (percussions, scratch). Très tranquille au début, Rhum One a naturellement imposé son talent, grâce aussi à beaucoup de fantaisie (de nombreuses citations, comme le Seven Nation Army des White Stripes), et n'a jamais cédé aux sirènes de la démonstration gratuite.

La prestation de Rhum One est d’autant plus à souligner qu’il était difficile de se faire une place aux côtés d’ Eli, dont le flow assuré a trouvé avec Art District l’environnement idéal. Intelligent, énergique, charismatique chanteur, l’américain a rapidement annihilé toutes velléités de résister à son indéniable talent.

Et on ne serait pas mécontent de voir se multiplier les occasions d'entendre Art District dans les clubs de la région.

http://www.myspace.com/artdistrict67

On retrouvera Eli mercredi 7 mai, lors de la deuxième session des Mercredi Live, qu’organise désormais le batteur Stéphane Scharlé, un mercredi sur deux au Café des Anges. Il y sera en très bonne compagnie puisque outre Eli et Stéphane Scharlé, on y entendra le saxophoniste David Florsch (Ozma), le trompettiste Paul Barbieri (Fanfare en Pétard, Laréosol), le vibraphoniste Ghislain Muller (VSP Orkestra, ZeroKlub) et le bassiste Edouard Sero-Guillaume (Ozma).


Soutenez les artistes, allez aux concerts.