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16/10/2010

Solomon Burke - No Man Walks Alone (1940-2010)


Comme souvent, on a pu lire tout et n’importe quoi depuis la mort de Solomon Burke dimanche dernier à Amsterdam.
Erreurs discographiques, chronologiques, tentatives, habituelles, de faire passer un mort pour un artiste maudit (« il n’a jamais rencontrer le succès d’un Otis Redding ou d’un Ray Charles ») qu’il n’a jamais été, ce sont tous les mauvais aspects de la « blogosphère » qui se sont rappelés à notre bon souvenir. Trop vite et mal écrit, par n’importe qui le plus souvent, l’important étant bien sûr de créer le « buzz » et d’augmenter considérablement son nombre de visiteurs.
Comme toujours dans pareil cas, on vous conseillera de vous adresser à Dieu plutôt qu’à ses disciples (euh… !). Et Dieu ici s’appelle Peter Guralnick, auteur de la bible « Sweet Soul Music » (aux éditions Allia) qui satisfera largement votre curiosité à propos de celui qu’on appelait le roi du « rock n’soul ».
Solomon Burke donc. Cet énorme bonhomme qu’on aura la plupart du temps vu assis sur un trône était l’un des plus grands chanteurs soul. Le plus grand ? Peu importe. Otis Redding, Sam Cooke, James Brown… il y en a pour tous les goûts.
J’ai fait connaissance avec le roi Solomon en 2002, en achetant Don’t Give Up on Me, le disque qui l’aura vu revenir sur le devant de la scène, grâce au génial Joe Henry et une poignée de chansons taillées à sa (dé)mesure. De celle qui donne son titre à l’album par exemple, une merveille signée du meilleur artisan de l’histoire de la musique soul, Dan Penn, jusqu’à ce qui est peut-être la plus grande chanson jamais chantée par Burke : Flesh and Blood, écrite, tient donc, par Joe Henry lui-même.
Vous remarquerez que le titre le plus connu de Solomon Burke, Everybody needs somebody to love, ne figure pas sur cette sélection. D’abord j’ai toujours détesté cette chanson. Ensuite, dans le corpus de Burke, ce sont ses ballades que je chéri particulièrement. C’est dans celles-ci que ses qualités vocales prennent toute leur ampleur. Une voix à la fois grave et puissante, qui sait pourtant se faire sensuelle, un peu à la manière d’un Bobby Blue Bland en moins rauque, en plus viril. En somme, une voix d’homme qui chante pour les femmes. Vous me direz quoi de surprenant à cela ? Je vous répondrai « pensez-vous que Thom Yorke ou bien l’un ou l’autre de ces chanteurs interchangeables officiant dans les groupes pop actuels s’adressent à cette femme, là-bas, seule au bar ? Evidemment non. Solomon, lui, si.

Parmi mes morceaux favoris, le très court et très classe Then I Want to Come Home sur lequel Burke "croone" au milieu d’une cour féminine, We’re Almost Home, qui fait entendre toute la souplesse de sa voix, ou encore le très moite Midnight and You, extrait de l’explicite et curieux Music To Make Love By, où le chanteur marche royalement sur les platebandes de Barry White.
J’évoquais déjà Flesh and Blood plus haut mais combien de fois ai-je écouté ce morceau où tout est parfait, depuis les musiciens (ceux des sessions du Tiny Voices de Joe Henry, notamment Jay Bellerose à la batterie et Chris Bruce à la guitare) jusqu’aux paroles du songwriter, comme toujours impeccables :

Now, you see a golden light
Because I’ve turned a golden light on,
Sometimes, God knows, you’ve got to
Learn to shine your own.
I step out of darkness
And for a moment I’m only living by your kiss,
And just for now our flesh and blood
Is no more real than this.

Il y a quelques mois sortait Nothing’s Impossible, témoignage de la rencontre entre Burke et le légendaire producteur d’Al Green ou Ann Peebles, Willie Mitchell. Ce dernier s’est éteint au début de l’année, rejoint l’autre jour par son « frère » Solomon.
Généreux, ils prenaient soin de laisser derrière eux une dernière ballade à tomber. « Oh, What a Feeling » est d’un autre temps, quintessence des grandes heures de la soul ou la voix de Burke s’ébroue sur les arrangements de cordes de Mitchell, les mêmes qui faisaient dans les années 60 et 70 les beaux jours de Hi Records.

On quittera finalement Solomon Burke des larmes plein les yeux en l’entendant murmurer Drown in my Own Tears popularisé par Ray Charles.

Vous pouvez désormais baisser la lumière, vous servir à boire, enlacer votre ami(e), le roi Solomon veille sur vous.

Spadee Sam presents – No Man Walks Alone, a Solomon Burke selection



01 – Rose saved from the Street (Hold on Tight, Universal 2010)
02 – Don’t give up on Me (Don’t Give Up On Me, Anti 2002)
03 – Medley : Meet me in Church, The Price, Words, Monologue (Soul Alive, Rounder 1983)
04 – No Man walks Alone (Solomon Burke, Kenwwod 1962)
05 – Can’t Nobody save You (King of Rock N’Soul, Atlantic 1964)
06 – Uptight Good Woman (Proud Mary, Bell 1969)
07 – Then I Want to Come Home (Cool Breeze O.S.T., MGM 1972))
08 – Misty (We’re Almost Home, MGM 1972)
09 – Everlasting Love (Music To Make Love By, Chess 1975)
10 – Midnight and You (Music To Make Love By, Chess 1975)
11 – Don’t Wait Too Long (Proud Mary, Bell 1969 )
12 – After All These Years (Make Do With What You Got, Shout Factory 2005)
13 – Flesh and Blood (Don’t Give Up On Me, Anti 2002)
14 – Keep a Light in The Window (I Wish I Knew, Atlantic 1968)
15 – Oh What a Feeling (Nothing’s Impossible, E1 Entertainment 2010)
16 – We’re Almost Home (We’re Almost Home, MGM 1972)
17 – If I Give My Heart to You (Like a Fire, Shout Factory 2008)
18 – That’s How I Got to Memphis (Nashville, Shout Factory 2006)
19 – Drown In My Own Tears (We’re Almost Home, MGM 1972)

25/06/2008

PLAT DU JOUR 11 - Ry Cooder, Elvis Costello, Lylie Auldist, Tricky, Randy Newman, Solomon Burke




Spadee Sam presents - Plat du Jour 11 Mix



01 – Elvis Costello and The ImpostersDrum and Bone (Momofuku 2008, Universal)
02 – Kylie Auldist with The BamboosCommunity Service Annoucement (Just Say 2008, TruThoughts)
03 – TrickyC’mon Baby (Knowle West Boy 2008, Pias)
04 – Ry CooderPink-o-Boogie (I, Flathead 2008, Nonesuch)
05 – Solomon BurkeUnderstanding (Like a Fire 2008, ShoutFactory)
06 – Randy NewmanHarps and Angels (Harps and Angels 2008, Nonesuch)
07 – Elvis Costello and The ImpostersHarry Worth (Momofuku 2008, Universal)
08 – Ry CooderCan I Smoke in Here (I, Flathead 2008, Nonesuch)
09 – Randy NewmanOnly a Girl (Harps and Angels 2008, Nonesuch)
10 – Matthew ShippThe Sweet Science (Right Hemisphere 2008, RogueArt)



Avec Elvis Costello, Solomon Burke, Ry Cooder, ou Randy Newman, ce sont des poids lourds de la musique populaire dont les disques sont ou s’apprètent à sortir ces temps-ci.

Le plus lourd des trois est sans conteste le roi Solomon, qui, de son trône, offre Like a Fire à un public dont on fait partie. Mais passée une première écoute rapide et prometteuse, on repère petit à petit les grosses ficelles qui font sombrer l’album dans le superficiel. Avec Eric Clapton ou Ben Harper à l’origine de certains des morceaux, il y avait honnêtement peu d’espoir de marquer les esprits. Surtout depuis l’exceptionnel Don’t Give Up On Me (Anti), qui, en 2002, avait vu le retour aux affaires de Burke. Mais sur ce dernier, c'était Joe Henry qui était aux manettes, et les chansons étaient signées du même Henry, de Tom Waits, Bob Dylan, Elvis Costello, Brian Wilson ou Dan Penn avec des musiciens qui avaient pour noms Jay Bellerose ou Chris Bruce. Un autre monde. Ici, la couche de vernis appliquée au disque par le producteur Steve Jordan ne tient pas les premières pluies et seule la voix, à jamais superbe, de Solomon Burke, survit à l’effondrement de l’édifice.

Solomon BurkeFlesh and Blood (Joe Henry)

Elvis Costello lui, va droit au but. Momofuku est un disque de rock direct, bien produit et si l’on est d’humeur à supporter la voix de canard à bout de souffle de Costello, c’est avec plaisir que l’on écoute un album qui débute teigneux, finit romantique, et regorge comme souvent d’excellentes chansons.

Signons vite une pétition pour l’amélioration des arrangements sur les disques pop. Le prochain Randy Newman, Harps and Angels souffre sacrément de ces affreuses vaguelettes de cordes, les mêmes qui pourissent quantité de films. Sinon, l’impression dominante est d’être dans un disque, poli, du Tom Waits de la fin des années 70, Blue Valentine ou Heartattack and Vine.
Agréable à écouter, suffisamment court pour ne pas trop s’y ennuyer, les textes canailles de l’extraordinaire parolier qu’est Newman sont beaucoup plus savoureux que la musique sur ce Harps and Angels , loin tout de même d'être un mauvais disque.




Randy NewmanA Few Words in Defense of Our Country

On sursaute en entendant la première plage du nouveau Tricky. Un motif de piano et la voix d’outre-tombe du chanteur font espérer le retour à la complexité tordue des premiers albums. Et puis, une chanteuse r’n’b et un gros riff qui tache viennent gâcher le plaisir. Puppy Toy, où le parfait résumé d’un très inégal Knowle West Boy. La flamme rallumée sur Coalition, moite à souhait, et pour le reste, des horreurs comme plusieurs raggas ridicules (Baccative, Balgaga), l’hommage pathétique à Hooverphonic (Past Mistake), ou du r’n’b à l’arrêt (Veronika). Frustrant.

TrickyPuppy Toy, Live at Jools Holland

Deux catégories semblent s’être formées dans le monde des nouvelles chanteuses soul. Les « populaires », avec Amy Winehouse bien sûr, puis Duffy, Adele et d’autres d’un côté, et les « alternatives », avec Sharon Jones, Alice Russell, Nicole Willis et désormais Kylie Auldist. Accompagnée par le groupe australien The Bamboos, cette dernière publie sur le label TruThoughts, Just Say, son premier album. On va la faire courte, c’est du déjà entendu mille fois. On peut néanmoins parfaitement l’entendre encore un peu si on nous sert des morceaux aussi bons que Community Service Annoucement ou No Use. En revanche, la reprise de Everybody Here Wants You de Jeff Buckley est dispensable. Surtout que c’est l’un des seuls morceaux de Buckley fils que l’on arrive encore à écouter. En tout cas, Just Say est plus que recommandable.

Pour terminer, Ry Cooder conclue sa trilogie californienne avec I, Flathead, qui, sans égaler le fantastique Chavez Ravine, est bien meilleur que le décevant My Name is Buddy, paru l’an dernier. Jim Keltner est toujours à la batterie et la musique cinématographique servie par Cooder est un très bon exemple de ce qu’on apprécie par ici. Un son chaud, de la musique riche à tous les niveaux, des histoires (Steel Guitar Heaven), de l’éclectisme, de l’humour (Johnny Cash), de la finesse (My Dwarf is Getting Tired), du rêve (Little Trona Girl). I, Flathead, un disque où l’on ne s’ennuie pas un instant. Pouvez-vous en citer beaucoup d’autres en ce moment ?

Ry CooderDown in Mississippi (JB Lenoir)


27/02/2008

DON'T GO BREAKING MY HEART, Sur La Piste de Marc Ribot


Afin de faire plus ample connaissance avec le guitariste américain Marc Ribot, voici quelques clés qui vous permettront peut-être de mieux aborder son oeuvre.
A la fin des années 70 et au début des années 80, c’est aux côtés de grands noms de la soul music comme Wilson Pickett ou Solomon Burke que l’on entend le guitariste. Faites sans hésiter l’acquisition de l’excellent Soul Alive (RounderRecords, 2002) du «king –Solomon- of rock n’soul» qui témoigne d’un concert à Washington en 1983 et où Ribot se tient aux côtés du roi.
On soulignera qu’il se définit dans plusieurs interviews comme un « guitariste de soul ».

Wilson Pickett chantant Land of 1000 Dances en 1971 :

http://www.youtube.com/watch?v=cdi1_Es85fA

Solomon Burke en concert en 1987 :

http://www.youtube.com/watch?v=IKZ3CmFZKgQ&feature=related

En passant, si vous voulez satisfaire votre soif de connaissance à propos du personnage Solomon Burke, lisez le magnifique livre de Peter Guralnick, « Sweet Soul Music, Rhythm and Blues et rêve sudiste de liberté» (Editions Allia).



La musique classique et contemporaine occupe également une place de choix dans les influences et les directions prisent par Ribot.
Jusqu’à 14 ans, il étudie la guitare avec le maître de la guitare classique hawaïenne Frantz Casseus. En 1999, après la mort de ce dernier, il lui rendra hommage avec le magnifique disque Marc Ribot plays solo guitar works of Frantz Casseus (Melod).

Pour en savoir plus sur la relation entre Ribot et le guitariste hawaïen, lisez cet excellent article écrit par Ribot lui-même :

http://www.bombsite.com/issues/82/articles/2540


Entre temps, en 1992, on a pu entendre sur Requiem For What's His Name le morceau LaMonte’s Nightmare (le cauchemar de LaMonte), allusion au compositeur minimaliste LaMonte Young.
Onze ans plus tard, en 2003, paraît chez Tzadik le disque Scelsi Morning, qui rassemble des pièces pour musique de chambre composé par Ribot. Si le morceau Bataille, qui ouvre celui- ci, est un hommage à Albert Ayler, les pièces suivantes sont inspirés des travaux des compositeurs Giacinto Scelsi (utilisation des percussions) ou Morton Feldman (des pièces contemplatives aux légères superpositions sonores). Et encore une fois un disque superbe, qui voit le guitariste être accompagné entre autres par Anthony Coleman (claviers), Ted Reichman (accordéon), Roberto Rodriguez (percussions) ou Ned Rothenberg (clarinettes).



Le rhythm and blues, la musique classique, le rock. Lorsque Ribot devient musicien professionnel, autour de 1977, c’est la fin du mouvement punk et le début du mouvement No Wave. L’une de ses principales influences va être le guitariste du groupe Richard Hell and The Voidoids, Robert Quine.



http://www.youtube.com/watch?v=nUU85sOxZ78



Ecoutez le solo de ce dernier en 1979 sur Knives in The Drain qu’on entend sur Queen of Siam de la chanteuse et poétesse Lydia Lunch puis celui de Ribot sur cette vidéo du morceau Voice of Chunk par les Lounge Lizards, le groupe des saxophonistes John Lurie et Roy Nathanson :

http://www.youtube.com/watch?v=kRY_PZIKeqM

Marc Ribot a fortement participé à l’aventure des Lounge Lizards, ainsi qu’à celle des Jazz Passengers de Nathanson.
Quant à Robert Quine, lui et Ribot seront réunis en 1997 sur le disque Painted Desert (Avant) de Ikue Mori.


On aura largement l’occasion de parler plus tard du travail de Marc Ribot avec Tom Waits, John Zorn et tant d’autres, mais si l’envie vous prenait de partir à l’aventure, pourquoi ne pas commencer avec l’album solo Don’t Blame Me (DiskUnion, 1995), largement accessible. Saints (Atlantic/WEA, 2001) est dans la même veine.
Puis faites danser vos amis avec les deux disques des Cubanos Postizos, tous deux excellents, et reposez-vous avec son album consacré aux pièces de Frantz Casseus.
Si vous n’êtes pas rassasié, allez écouter ses musiques de films (Shoe String Symphonettes, 1997 et Soundtrack II, Tzadik 2003) avant d’attaquer les plus difficiles et plus inégaux Rootless Cosmopolitans, Shrek, Requiem for What’s His Name (1992) et Yo ! I Killed Your God (Tzadik, 1999).
Et The Book of Heads (Tzadik, 1995), les pièces de guitare composées à l’origine pour Eugene Chadbourne par John Zorn et dont Ribot s’est finalement chargé d’éxécuter ? euh, attendez un peu peut-être…

Pour finir, parmi les nombreux guitaristes sur lesquels Marc Ribot a exercé une influence, citons le jeune italien Alessandro "Asso" Stefana, accompagnateur régulier depuis plusieurs années du chanteur Vinicio Capossela et qui s’est retrouvé adoubé par le maître par le biais d’une reprise de l’une de ses compositions par le Ceramic Dog de Ribot :

Poste e Telegrafi Blues de Stefana, joué par le Ceramic Dog de Marc Ribot :

http://www.youtube.com/watch?v=LNfEtmzqTw4

Et cette curiosité, Alessandro Stefana accompagnant à la guitare classique le chanteur Mike Patton sur La Scalinatella, une chanson de Roberto Murolo :

http://www.youtube.com/watch?v=3C9LE8a-nOc&mode=related&search=

Non Trattare de Vinicio Capossela, avec Stefana à la guitare :

http://www.alessandrostefana.com/

Bref, en attendant de voir Marc Ribot près de chez vous, écoutez sa musique.

14/01/2008

THE ROAD, La Route avec Cormac McCarthy et Jim White


Photo : Claudia Marschal



Son dernier livre, The Road, est un chef d'oeuvre.L'adaptation au cinéma par les frères Coen de son avant-dernier, No Country For Old Man, sort très prochainement. Vous pouvez sans hésiter vous plongez dans l'oeuvre de l'un des plus grands écrivains vivants, Cormac McCarthy.

Lançons-nous donc à sa recherche ...


... enfin le voici...


Et puis, entre deux séances de lecture des livres de McCarthy, un disque s'impose : Drill a Hole in That Substrate and Tell Me What You See (LuakaBop, 2004) de Jim White.

Il y'a une ou deux choses pas mal sur les autres albums de Jim White mais rien qui approche la magie opérant sur celui-çi, l'un des plus beaux disques de tous les temps.

Insistons sur l'importance d'un bon producteur, avec le casting de musiciens et les idées qui viennent avec. La musique comme le cinéma.

C'est donc le formidable Joe Henry qui est aux manettes sur la majorité des titres, Tucker Martine et Jim White se partageant les autres plages.
Pour les musiciens, c'est ici grosso modo la même équipe qui entourait Joe Henry sur son album Tiny Voices (Anti, 2003) et sur Don't Give Up On Me (Anti, 2002), le disque qui signa le retour aux affaires de Solomon Burke, et également produit par Henry. Soit Chris Bruce à la guitare, David Palmer aux claviers, David Piltch à la contrebasse et Jay Bellerose à la batterie.



Static On The Radio ouvre le disque avec la superbe voix de Jim White qui emmène vers un monde ou dans la confession le rejoint la chanteuse Aimee Mann.

Si ce morceau et tout ce qui suit est à ce point génial, c'est qu'il se passe des multiples et micro incidents à chaques niveaux de la musique. Le squelette des chansons de Jim White est souvent très simple, trois, quatre accords. Mais en écoutant attentivement il se passe quantité de petits évenements sonores provocant de multiples images.
Static On The Radio est ainsi illuminé à la toute fin par un discret motif vocal.
La ballade qui suit, Bluebird est encore un cran au-dessus. Elle reçoit le soutien de l'excellent M.Ward à la guitare et on peut bien écouter ce morceau des dizaines de fois pour saisir la douceur et la finesse du jeu de balais de Jay Bellerose, les légers arpèges de guitares (Chris Bruce et M.Ward) ou la fabuleuse utilisation des claviers (piano, orgue) par David Palmer.

Et comment ne pas s'incliner devant le travail génial de Joe Henry, chef d'orchestre de cette mise en sons.

Ce dernier intervient à la guitare sur le décalé, cool et funky Combing My Hair In a Brand New Style où on entend également la voix grave de Mark Anthony Thompson aka Chocolate Genius.

"Oh doux Jésus veux-tu bien m'aider ? car tout ce que j'essaye de faire c'est semer les graines de l'amour avec cette fille de Brownsville, Texas (...).

Que dire de plus ? Une voix magnifique, un choeur discret, une douceur... ce rythme dans l'écriture et la diction et des mots et des phrases, qui rappelle... Cormac McCarthy.

Jim White s'occupe de produire Borrowed Wings , pour le coup plus dépouillé mais d'excellente facture, ou l'on entend Susie Ungerleider, de Oh Susanna.

Vient alors l'immense If Jesus Drove a Motor Home :


"If Jesus drove a motor home, I wonder would he drive pedal to the metal, or real slow? Checking out the stereo. Cassetteplaying Bob Dylan, motivation tapes. Tricked up Winnebago, with the tie-dye drapes. If Jesus drove a motor home... If Jesusdrove a motor home, and he come to your town, would you try to talk to him? Would you follow him around? Honking horns atthe drive thru. Double-parking at the mall. Midnight at the Waffle House - Jesus eating eggs with ya'll. If Jesus drove amotor home... Buddha on a motorcycle, Mohammed in a train. Here come Jesus in the passing lane... but everybody smile, 'causeeverybody's grooving. Ain't nothing like the feeling of moving with a bona fide motorized savior. Now if we all drovemotor homes, well maybe in the end, with no country to die for, we could just be friends. One world as our highway. Ain'tno yours or my way. We'd be cool wherever we roam - if Jesus drove a motor. "

Paroles géniales, musique idem. Clavier sautillant, un motif de flute puis cette trompette sortie de nulle part.

C'est Tucker Martine, pas manchot non plus pour ce qui est de produire un disque qui s'occupe de mettre en son le moite Objects in Motion. Normal donc d'y retrouver Bill Frisell et le violoniste Eyvind Kang, deux musiciens avec lesquels il travaille régulièrement depuis quelques années.

Un morceau en plein marécage.

"(...) just yesterday i found a suitcase full of love letters floating down a cool brown river."

Et encore un chef d'oeuvre, d'une richesse sonore impressionnante, où percussions, pedal steel et cordes s'enroulent autour des sons de guitare magnifique de Bill Frisell.
Et si Buzzards of Love et Alabama Chrome sont plus communs, Drill a Hole se termine sur un émouvant Phone Booth in Heaven ou l'on retrouve M.Ward mais aussi la chanteuse Mary Gauthier (dont le dernier disque Between Daylight and Dark (LostHighway, 2007) est également produit par Joe Henry).

Avec les livres de Cormac McCarthy et Drill a Hole... de Jim White dans le casque, bonnes soirées dans le sud américain.

14/11/2007

JAZZDOR EP.00 - JAMES BLOOD ULMER (08/11/2007)

Jazzdor avant l’heure.

Pour commencer ce 22ème festival Jazzdor, James Blood Ulmer se produisait au Conservatoire de Strasbourg, jeudi 8 novembre 2007, accompagné d’un jeune quatuor à cordes.
Le guitariste et chanteur américain a surtout tricoté à la guitare (l'harmolodie ?!!) sur des pièces agréables à entendre et bien interprétées par les cordes, mais au final assez anecdotiques.
Le moment fort du concert aura été l'unique blues, Maya ou la voix de Ulmer, doublée au début des couplets par le violoncelle, était poignante. "Maya, take me higher"...

On parlait récemment du disque de Robert Plant et de Alison Krauss produit par T-Bone Burnett.
On retrouve la chanteuse et violoniste country derrière James Blood Ulmer sur la très belle captation d’un concert hommage au blues, produit et présenté par Martin Scorsese, Lightning In a Bottle.
Le genre de soirée comme les Américains savent si bien en faire : Spectacle impeccable et musique géniale.
Krauss accompagne donc Ulmer sur un magnifique Sittin On The Top The World de Mississippi Sheiks.

http://www.youtube.com/watch?v=VmqI2QTknO8

Mavis Staples est, comme sur son dernier disque We'll Never Turn Back (Anti,2007), impressionante sur See That My Grave Is Kept Clean de Skip Johnson.
Sinon on peut y voir et entendre Angelique Kidjo, India Arie, Clarence Gatemouth Brown, Steven Tyler et Joe Perry du groupe Aerosmith, qui n’ont pas pris une ride depuis dix ou vingt ans, Keb’Mo, Ruth Brown, Macy Gray, les Neville Brothers ainsi que l’impayable Solomon Burke, toujours sur son trone !

Pour en revenir à James Blood Ulmer, deux disques récents sont particulièrement recommandables, tous deux parus chez Hyena Records : Memphis Blood-The Sun Sessions (2001) ou il reprend quelques standards tels Spoonful, I Just Want To Make Love To You ou I Want To Be Loved ainsi que son dernier disque Bad Blood In The City-The Piety Street Sessions (2007), produit par Vernon Reid, guitariste du groupe Living Colour. L'heure n’est pas à la rigolade comme l’indique le titre qui ouvre le disque, Survivors of The Hurricane. La suite est dans la meme veine : Katrina, This Land Is Nobody’s Land, Dead Presidents et pour finir Old Slave Master. Ulmer règle ses comptes avec la gestion gouvernementale de la catastrophe Katrina à la Nouvelle-Orléans. La musique est superbe, particulièrement sur les blues lents comme Katrina, This Land Is Nobody’s Land, Grinnin’ In Your Face et Backwater Blues quand certains titres plus rapides ne sont pas dénués d’humour (Let’s Talk About Jesus ou Dead Presidents).