29/11/2007

JAZZDOR EP.06 - OVALE + DELIRIUM (20et22/11/2007)

Ovale puis Délirium, à l'affiche de la Friche Laiterie pour la dernière semaine du festival Jazzdor , mardi 20 et jeudi 22 novembre à 22 heures.

D'abord, les locaux d'Ovale délivraient une prestation en demi-teinte. Pierre Michel aux saxophones et Serge Haessler à la trompette et au cor furent excellent, tandis que Vincent Posty était comme à son habitude impeccable à la contrebasse. Les compositions de ce dernier se révélèrent également très intéressantes. A la batterie, Pascal Gully se montra moins enthousiasmant qu'à son habitude, privilégiant un jeu en puissance quand on aurait peut-être aimé plus de nuances. La clarinettiste Sylvie Brucker fut quand à elle prise en plein délit d'abus d'utilisation 'effets sur sa voix, qu'elle modifiait en hurlant les textes d'Elias Canetti. Dommage, car quand elle se contentait d'évoquer naturellement les mots de l'écrivain, leur superposition à la musique était plutôt réussie, en particulier sur les morceaux les plus rapides.

En cloture de ces soirées au Hall des Chars, les finno-danois de Delirium montaient sur scène jeudi 22. Une rythmique impeccable, Jonas Westergaard à la contrebasse et Stefan Pasborg à la batterie, pour soutenir les deux souffleurs Miko Innanen aux saxophones et Kasper Tranberg à la trompette.
La formation faisait preuve d’une énergie et d’un humour réjouissant pour cette dernière soirée, en témoigna deux rappels et un hommage à Moussorgsky avant de s'en aller.

19/11/2007

JAZZDOR EP.05 - BENOIT DELBECQ/HAN BENNINK + TERJE ISUNGSET/JORMA TAPIO (17/11/2007)

Une infidélité à la salle de la Friche Laiterie/Hall des Chars samedi 17 novembre 2007 à 17 heures, afin de voir et d'entendre en duo le batteur néerlandais Han Bennink et le pianiste français Benoit Delbecq, dans l’auditorium du Musée d’Art Moderne de Strasbourg.
L'osmose était totale entre deux musiciens dont les aspects paraissaient diamétralement opposés. D'un coté Benoit Delbecq, sobre à son piano. De l'autre, Han Bennink, 65 ans, bandana autour de la tete, Monsieur Hulot en batteur jazz.
Peu, voire aucun regard échangé entre les deux musiciens pendant les morceaux, mais l’impression d’une complicité de longue date.
Tandis que Bennink attirait les regards par son jeu de scène comique, cachant une inventivité percussive impressionnante (baguettes poussées au sol, utilisation de toutes les surfaces qui l’entoure), Delbecq était magnifique au piano. La plupart de ses compositions reposaient sur une première partie méditative, inspirée de la musique électronique voir techno, sur laquelle Bennink s’en donnait à cœur joie. Puis, sans prévenir, on se retrouvait à fredonner sur les notes jouées par Delbecq, le batteur se transformant en accompagnateur idéal de ces mélodies chantantes.
Avec des détours réjouissants par le blues et Monk, tout était idéal pour un concert plein d’humour et de sensibilité par deux musiciens formidables dans leur générosité.

Le percussioniste norvégien Terje Isungset et le finlandais Jorma Tapio au saxophone, clarinette et flutes cloturaient cette semaine au Hall des Chars à 22 heures.
Le concert fut quelque part assez proche de celui donné la veille par Akosh S. et Gildas Etevenard, avec quelque chose de plus «animalier» chez les Scandinaves. Là ou le saxophoniste hongrois et le percussioniste français entrainaient les auditeurs vers les paysages d’Europe de l’Est, aussi bien avec les instruments joués qu’avec les échelles et gammes employés au saxophone par Akosh S., la musique de Isungset et Tapio emmenait vers le nord, vers la glace et suggérait la vie à la limite des glaces et de la terre. Isungset fit intervenir tardivement quelques éléments électroniques, pas forcément du meilleur effet, mais comme pour Akosh S. et Etevenard la veille, on passait un très bon moment loin du quotidien avec ce duo hors du temps.

JAZZDOR EP.04 - PANIQUE + GILDAS ETEVENARD/AKOSH S. (16/11/2007)

Le groupe Panique, Antoine Arlot au saxophone alto, Eric Hurpeau à la guitare, Pierre Boespflug au Fender Rhodes, Jean-Luc Déat à la basse éclectrique et Charlie Davot à la batterie, montait sur la scène de la Friche Laiterie à 18h le vendredi 16 novembre.
Ce n’était que le troisième concert du groupe originaire de Nancy, formé il y a quelques mois à peine.
Si le groupe ne revendique pas son influence directe, on ne pouvait s’empecher de penser aux formations Masada de John Zorn, acoustique et électrique, notamment de par l’utilisation du Fender Rhodes, de la basse et de la guitare électrique, et meme si Eric Hurpeau, qui jouait de cette dernière, était au niveau du son comme du jeu plutot Frisell que Ribot. Zorn, du reste, n’était jamais très loin lorsque l'on observait Antoine Arlot, par ailleurs excellent, se contorsionner faisant hurler son saxophone sur des morceaux dont la structure, avec thème très marqué précédent des moments d'improvisation, faisait là encore échos à l' Acoustic Masada.
Certains titres lorgnaient quant à eux du coté du rock progressif et de Soft Machine, avec ces thèmes joués à l’unisson entre le saxophone et la guitare.
C’était bien dans les morceaux les plus vifs que Panique était le plus à l’aise, avec un Antoine Arlot tour à tour agressif et lyrique, entouré par de très bons musiciens dont la cohésion y gagnera probablement avec les concerts.
En attendant, ne vous privez pas d'écouter les quelques titres disponibles sur leur site Myspace et pour plus d'informations rendez-vous sur leur excellent site officiel, ou vous pourrez écouter l'intégralité de leur concert au Nancy Jazz Pulsation 2006. Voici les liens :

A 22h, Akosh S. aux saxophones, clarinettes et percussions leur succédait sur la meme scène , accompagné par Gildas Etevenard à la batterie et percussions, pour un voyage de presque une heure et demi dans les paysages d’Europe de l’Est. Etevenard s’est fait particulièrement remarqué lorsqu’il joua sur cet instrument percussif à cordes dont jouent les femmes dans une vallée de Moldavie, le gordon. Un très beau concert qu’il fallait apprécié détendu et déconnecté du quotidien.

18/11/2007

JAZZDOR EP.03 - WARK + TRIO BRAAM/DEJOODE/VATCHER (15/11/2007)

Jeudi 15 novembre, 18h, c’était la jeune formation Wark, composée des saxophonistes Marc Baron (alto) et Antoine Daures (ténor), du batteur Guillaume Dommartin et de celui qui est à l’origine du projet, le contrebassiste Sebastien Beliah, qui montait sur la scène du Hall des Chars.
Si les quatre musiciens furent très bons, les compositions ont semblé manquer de cohésion, de ligne directrice, et c’est dans les moments d’improvisation que les membres du groupe ont pu mettre en avant leurs qualités, notamment les deux saxophonistes Marc Baron et Antoine Daures, excellents dans plusieurs solos qui donnaient envie de les réentendre avec un peu plus de «folie».

A 22h, c’est le trio néerlandais du pianiste Michiel Braam, du contrebassiste Wilbert DeJoode et du batteur Michael Vatcher qui jouait des pièces du répertoire composant le disque Change This Song (BBB, 2005). 18 morceaux pouvant etre joués «dans n’importe quel ordre et style, décision étant prise sur le moment».
Comme le disque l'est, le concert fut formidable. A la batterie, Michael Vatcher, expressif à souhait. A la contrebasse, Wilbert DeJoode paraît être le modérateur du trio, tout en douceur douceur. Car à l'opposé de Vatcher, Michael Braam est d'une grande sobriété, économe de ses gestes. Il distille accords et notes avec un sens de l’humour et une poésie incroyable. Du ragtime à la musique pop (le superbe Nightsong Aches en rappel), Michiel Braam évolue sans cesse à la frontière de différents courants musicaux avec une légereté admirable. Grace à lui et à ses complices Vatcher et DeJoode, la soirée fut superbe.

PS : Après avoir fait l’acquisition de l’album Change This Song du trio Braam/DeJoode/Vatcher, n’hésitez-pas une seconde à vous procurez l’excellent Senne Sing Song (Tzadik, 2005) de Misha Mengelberg, autre grand pianiste néerlandais, ici accompagné par Greg Cohen à la contrebasse et Ben Perowsky à la batterie.

JAZZDOR EP.02 - ISWHAT?! (14/11/2007)

Le mercredi 14 novembre 2007, c’était au tour de IsWhat?! de jouer dans la salle du Hall des Chars.
Leader de ce groupe de jazz hip-hop acoustique originaire de Cincinatti, le chanteur Napoleon Maddox était acompagné par le contrebassiste Joe Fonda, les saxophonistes Cocheme’a Gastelum et Oliver Lake ainsi que par le batteur Benjamin Sanz.
Quelques heures auparavant, Napoleon Maddox s'expliquait sur l’origine du projet. Il grandi en écoutant les pionniers du hip-hop, Afrika Bambataa ou KRS-One. Un jour, il voit Charles Mingus à la télévision s'expliquant sur les problèmes de logement qu’il rencontre à New-York. Au meme moment, Maddox découvre la musique de Thelonious Monk et comprend que le rythme du jazz, du bebop, de Monk, c'est celui de la rue, que le message de Mingus, cette manière d'évoquer les problèmes sociaux, doit etre celui du hip-hop.
IsWhat ?!, que Maddox fonde avec le saxophoniste Jack Walker nait de cette envie de rencontre entre le rap et le jazz. Le groupe publie deux albums, You Figure Out en 2004 et The Life We Chose en 2006, tous les deux parus chez HyenaRecords.
Ce sont pour la plupart des titres du dernier album qu’interprétait le groupe ce soir.

Un premier set énergique d’une heure a vu le groupe interpréter les morceaux Casket ou Ill Bizz, puis un second set ou l'on a pu entendre un très dansant Circus, la reprise hip-hop du Kashmir de Led Zeppelin et le morceau titre The Life We Chose avant de conclure sur une jam reggae ou Maddox a changé sa veste d’human beatbox pour celle de chanteur nu soul.

On ne peut pas reprocher grand-chose à Napoleon Maddox, excellent showman et personnalité remarquable. Mais il a semblé manqué un petit quelque chose à l’ensemble. Cocheme’a Gastelum a pris les solos les plus intéressants tandis que Oliver Lake se tenait un peu en retrait. Le batteur Benjamin Sanz, qui remplacait au pied levé Hamid Drake, a fait le boulot malgré une tendance au passage en force qui aurait pu à quelques reprises etre évité.
C’est le contrebassiste Joe Fonda qui fut le plus impressionnant, explosif, communicatif dans son plaisir de jouer. C’est incontestablement lui qui tenait la barre de IsWhat ?! lors de ce concert, assurémént le plus « pop » du festival.

14/11/2007

JAZZDOR EP.01 - DAS KAPITAL / WONDERLAND (13/11/2007)

C'est avec le projet Wonderland que débutait mardi 13 novembre à 22heures la série de concerts "en club" du festival Jazzdor de Strasbourg, au Hall des Chars-Laiterie.

Deux rencontres préalables avec le public avaient permis aux membres du groupe d’expliquer le dispositif de cette «création nomade». Les cinéastes Martin Otter et Nicolas Humbert (auteur des films «Step Across The Border», «In The Middle of The Moment», «3 Windows») filment des images dans la ville du concert les jours qui précèdent celui-çi. Ils montent ensuite un film diffusé pendant le concert sur deux écrans entourant sur scène les membres du trio Das Kapital, Edward Perraud à la batterie, Hasse Poulsen à la guitare et Daniel Erdmann aux saxophones.

Il a semblé se dessiner pendant le concert deux parties plus ou moins distinctes. Une première ou les images accompagnaient une musique pleine d’inventivité mélodique, pendant que sur les écrans on pouvait suivre des personnages marchant dans les rues de la ville. Puis une seconde ou la musique s’est presque «effacée» mélodiquement au profit des images et d'un chaos musical progressif.

Les musiciens avaient auparavant présenté Nicolas Humbert comme un «poète de l’image». On n’aurait pu trouver terme plus exact tant ce que l’on a vu sur les deux écrans pendant le concert s’est révélé merveilleux. Autant la première partie du film était urbaine, souvent nocturne mais toujours civilisée, autant la seconde fut une véritable plongée au cœur de la nuit, où rêves et cauchemars ne formaient plus qu’un seul et même songe. Danse macabre, automates squelettiques désarticulés filmés en mouvement. Le travail effectué par Nicolas Humbert et Martin Otter, en quelques jours pour filmer et en quelques heures pour monter, a touché au sublime.
Dans les regards et les mouvements des personnages-objets qu’on observait sur les images diffusées, il y avait tout ce qui se passait au meme moment entre les trois musiciens sur scène. Le lyrisme grave du saxophoniste Daniel Erdmann et la douceur amplifiée du guitariste Hasse Poulsen entouraient le superbe batteur Edward Perraud dont la palette d’idées de sons et de rythmes a magnifiquement souligné toutes les atmosphères imaginables.
Trois musiciens formidables, aussi agréables et intelligents dans la vie qu’inventifs sur scène.

Ne passez pas à coté du projet Wonderland s'il passe près de chez vous et vous plongerez dans un «monde merveilleux». Une manière idéale de se rappeler que "l'art, c'est là ou l'on est"...
En lien, les sites de Das Kapital et de ses musiciens, ainsi que celui du cinéaste Nicolas Humbert.

JAZZDOR EP.00 - JAMES BLOOD ULMER (08/11/2007)

Jazzdor avant l’heure.

Pour commencer ce 22ème festival Jazzdor, James Blood Ulmer se produisait au Conservatoire de Strasbourg, jeudi 8 novembre 2007, accompagné d’un jeune quatuor à cordes.
Le guitariste et chanteur américain a surtout tricoté à la guitare (l'harmolodie ?!!) sur des pièces agréables à entendre et bien interprétées par les cordes, mais au final assez anecdotiques.
Le moment fort du concert aura été l'unique blues, Maya ou la voix de Ulmer, doublée au début des couplets par le violoncelle, était poignante. "Maya, take me higher"...

On parlait récemment du disque de Robert Plant et de Alison Krauss produit par T-Bone Burnett.
On retrouve la chanteuse et violoniste country derrière James Blood Ulmer sur la très belle captation d’un concert hommage au blues, produit et présenté par Martin Scorsese, Lightning In a Bottle.
Le genre de soirée comme les Américains savent si bien en faire : Spectacle impeccable et musique géniale.
Krauss accompagne donc Ulmer sur un magnifique Sittin On The Top The World de Mississippi Sheiks.

http://www.youtube.com/watch?v=VmqI2QTknO8

Mavis Staples est, comme sur son dernier disque We'll Never Turn Back (Anti,2007), impressionante sur See That My Grave Is Kept Clean de Skip Johnson.
Sinon on peut y voir et entendre Angelique Kidjo, India Arie, Clarence Gatemouth Brown, Steven Tyler et Joe Perry du groupe Aerosmith, qui n’ont pas pris une ride depuis dix ou vingt ans, Keb’Mo, Ruth Brown, Macy Gray, les Neville Brothers ainsi que l’impayable Solomon Burke, toujours sur son trone !

Pour en revenir à James Blood Ulmer, deux disques récents sont particulièrement recommandables, tous deux parus chez Hyena Records : Memphis Blood-The Sun Sessions (2001) ou il reprend quelques standards tels Spoonful, I Just Want To Make Love To You ou I Want To Be Loved ainsi que son dernier disque Bad Blood In The City-The Piety Street Sessions (2007), produit par Vernon Reid, guitariste du groupe Living Colour. L'heure n’est pas à la rigolade comme l’indique le titre qui ouvre le disque, Survivors of The Hurricane. La suite est dans la meme veine : Katrina, This Land Is Nobody’s Land, Dead Presidents et pour finir Old Slave Master. Ulmer règle ses comptes avec la gestion gouvernementale de la catastrophe Katrina à la Nouvelle-Orléans. La musique est superbe, particulièrement sur les blues lents comme Katrina, This Land Is Nobody’s Land, Grinnin’ In Your Face et Backwater Blues quand certains titres plus rapides ne sont pas dénués d’humour (Let’s Talk About Jesus ou Dead Presidents).