29/11/2007

JAZZDOR EP.06 - OVALE + DELIRIUM (20et22/11/2007)

Ovale puis Délirium, à l'affiche de la Friche Laiterie pour la dernière semaine du festival Jazzdor , mardi 20 et jeudi 22 novembre à 22 heures.

D'abord, les locaux d'Ovale délivraient une prestation en demi-teinte. Pierre Michel aux saxophones et Serge Haessler à la trompette et au cor furent excellent, tandis que Vincent Posty était comme à son habitude impeccable à la contrebasse. Les compositions de ce dernier se révélèrent également très intéressantes. A la batterie, Pascal Gully se montra moins enthousiasmant qu'à son habitude, privilégiant un jeu en puissance quand on aurait peut-être aimé plus de nuances. La clarinettiste Sylvie Brucker fut quand à elle prise en plein délit d'abus d'utilisation 'effets sur sa voix, qu'elle modifiait en hurlant les textes d'Elias Canetti. Dommage, car quand elle se contentait d'évoquer naturellement les mots de l'écrivain, leur superposition à la musique était plutôt réussie, en particulier sur les morceaux les plus rapides.

En cloture de ces soirées au Hall des Chars, les finno-danois de Delirium montaient sur scène jeudi 22. Une rythmique impeccable, Jonas Westergaard à la contrebasse et Stefan Pasborg à la batterie, pour soutenir les deux souffleurs Miko Innanen aux saxophones et Kasper Tranberg à la trompette.
La formation faisait preuve d’une énergie et d’un humour réjouissant pour cette dernière soirée, en témoigna deux rappels et un hommage à Moussorgsky avant de s'en aller.

19/11/2007

JAZZDOR EP.05 - BENOIT DELBECQ/HAN BENNINK + TERJE ISUNGSET/JORMA TAPIO (17/11/2007)

Une infidélité à la salle de la Friche Laiterie/Hall des Chars samedi 17 novembre 2007 à 17 heures, afin de voir et d'entendre en duo le batteur néerlandais Han Bennink et le pianiste français Benoit Delbecq, dans l’auditorium du Musée d’Art Moderne de Strasbourg.
L'osmose était totale entre deux musiciens dont les aspects paraissaient diamétralement opposés. D'un coté Benoit Delbecq, sobre à son piano. De l'autre, Han Bennink, 65 ans, bandana autour de la tete, Monsieur Hulot en batteur jazz.
Peu, voire aucun regard échangé entre les deux musiciens pendant les morceaux, mais l’impression d’une complicité de longue date.
Tandis que Bennink attirait les regards par son jeu de scène comique, cachant une inventivité percussive impressionnante (baguettes poussées au sol, utilisation de toutes les surfaces qui l’entoure), Delbecq était magnifique au piano. La plupart de ses compositions reposaient sur une première partie méditative, inspirée de la musique électronique voir techno, sur laquelle Bennink s’en donnait à cœur joie. Puis, sans prévenir, on se retrouvait à fredonner sur les notes jouées par Delbecq, le batteur se transformant en accompagnateur idéal de ces mélodies chantantes.
Avec des détours réjouissants par le blues et Monk, tout était idéal pour un concert plein d’humour et de sensibilité par deux musiciens formidables dans leur générosité.

Le percussioniste norvégien Terje Isungset et le finlandais Jorma Tapio au saxophone, clarinette et flutes cloturaient cette semaine au Hall des Chars à 22 heures.
Le concert fut quelque part assez proche de celui donné la veille par Akosh S. et Gildas Etevenard, avec quelque chose de plus «animalier» chez les Scandinaves. Là ou le saxophoniste hongrois et le percussioniste français entrainaient les auditeurs vers les paysages d’Europe de l’Est, aussi bien avec les instruments joués qu’avec les échelles et gammes employés au saxophone par Akosh S., la musique de Isungset et Tapio emmenait vers le nord, vers la glace et suggérait la vie à la limite des glaces et de la terre. Isungset fit intervenir tardivement quelques éléments électroniques, pas forcément du meilleur effet, mais comme pour Akosh S. et Etevenard la veille, on passait un très bon moment loin du quotidien avec ce duo hors du temps.

JAZZDOR EP.04 - PANIQUE + GILDAS ETEVENARD/AKOSH S. (16/11/2007)

Le groupe Panique, Antoine Arlot au saxophone alto, Eric Hurpeau à la guitare, Pierre Boespflug au Fender Rhodes, Jean-Luc Déat à la basse éclectrique et Charlie Davot à la batterie, montait sur la scène de la Friche Laiterie à 18h le vendredi 16 novembre.
Ce n’était que le troisième concert du groupe originaire de Nancy, formé il y a quelques mois à peine.
Si le groupe ne revendique pas son influence directe, on ne pouvait s’empecher de penser aux formations Masada de John Zorn, acoustique et électrique, notamment de par l’utilisation du Fender Rhodes, de la basse et de la guitare électrique, et meme si Eric Hurpeau, qui jouait de cette dernière, était au niveau du son comme du jeu plutot Frisell que Ribot. Zorn, du reste, n’était jamais très loin lorsque l'on observait Antoine Arlot, par ailleurs excellent, se contorsionner faisant hurler son saxophone sur des morceaux dont la structure, avec thème très marqué précédent des moments d'improvisation, faisait là encore échos à l' Acoustic Masada.
Certains titres lorgnaient quant à eux du coté du rock progressif et de Soft Machine, avec ces thèmes joués à l’unisson entre le saxophone et la guitare.
C’était bien dans les morceaux les plus vifs que Panique était le plus à l’aise, avec un Antoine Arlot tour à tour agressif et lyrique, entouré par de très bons musiciens dont la cohésion y gagnera probablement avec les concerts.
En attendant, ne vous privez pas d'écouter les quelques titres disponibles sur leur site Myspace et pour plus d'informations rendez-vous sur leur excellent site officiel, ou vous pourrez écouter l'intégralité de leur concert au Nancy Jazz Pulsation 2006. Voici les liens :

A 22h, Akosh S. aux saxophones, clarinettes et percussions leur succédait sur la meme scène , accompagné par Gildas Etevenard à la batterie et percussions, pour un voyage de presque une heure et demi dans les paysages d’Europe de l’Est. Etevenard s’est fait particulièrement remarqué lorsqu’il joua sur cet instrument percussif à cordes dont jouent les femmes dans une vallée de Moldavie, le gordon. Un très beau concert qu’il fallait apprécié détendu et déconnecté du quotidien.

18/11/2007

JAZZDOR EP.03 - WARK + TRIO BRAAM/DEJOODE/VATCHER (15/11/2007)

Jeudi 15 novembre, 18h, c’était la jeune formation Wark, composée des saxophonistes Marc Baron (alto) et Antoine Daures (ténor), du batteur Guillaume Dommartin et de celui qui est à l’origine du projet, le contrebassiste Sebastien Beliah, qui montait sur la scène du Hall des Chars.
Si les quatre musiciens furent très bons, les compositions ont semblé manquer de cohésion, de ligne directrice, et c’est dans les moments d’improvisation que les membres du groupe ont pu mettre en avant leurs qualités, notamment les deux saxophonistes Marc Baron et Antoine Daures, excellents dans plusieurs solos qui donnaient envie de les réentendre avec un peu plus de «folie».

A 22h, c’est le trio néerlandais du pianiste Michiel Braam, du contrebassiste Wilbert DeJoode et du batteur Michael Vatcher qui jouait des pièces du répertoire composant le disque Change This Song (BBB, 2005). 18 morceaux pouvant etre joués «dans n’importe quel ordre et style, décision étant prise sur le moment».
Comme le disque l'est, le concert fut formidable. A la batterie, Michael Vatcher, expressif à souhait. A la contrebasse, Wilbert DeJoode paraît être le modérateur du trio, tout en douceur douceur. Car à l'opposé de Vatcher, Michael Braam est d'une grande sobriété, économe de ses gestes. Il distille accords et notes avec un sens de l’humour et une poésie incroyable. Du ragtime à la musique pop (le superbe Nightsong Aches en rappel), Michiel Braam évolue sans cesse à la frontière de différents courants musicaux avec une légereté admirable. Grace à lui et à ses complices Vatcher et DeJoode, la soirée fut superbe.

PS : Après avoir fait l’acquisition de l’album Change This Song du trio Braam/DeJoode/Vatcher, n’hésitez-pas une seconde à vous procurez l’excellent Senne Sing Song (Tzadik, 2005) de Misha Mengelberg, autre grand pianiste néerlandais, ici accompagné par Greg Cohen à la contrebasse et Ben Perowsky à la batterie.

JAZZDOR EP.02 - ISWHAT?! (14/11/2007)

Le mercredi 14 novembre 2007, c’était au tour de IsWhat?! de jouer dans la salle du Hall des Chars.
Leader de ce groupe de jazz hip-hop acoustique originaire de Cincinatti, le chanteur Napoleon Maddox était acompagné par le contrebassiste Joe Fonda, les saxophonistes Cocheme’a Gastelum et Oliver Lake ainsi que par le batteur Benjamin Sanz.
Quelques heures auparavant, Napoleon Maddox s'expliquait sur l’origine du projet. Il grandi en écoutant les pionniers du hip-hop, Afrika Bambataa ou KRS-One. Un jour, il voit Charles Mingus à la télévision s'expliquant sur les problèmes de logement qu’il rencontre à New-York. Au meme moment, Maddox découvre la musique de Thelonious Monk et comprend que le rythme du jazz, du bebop, de Monk, c'est celui de la rue, que le message de Mingus, cette manière d'évoquer les problèmes sociaux, doit etre celui du hip-hop.
IsWhat ?!, que Maddox fonde avec le saxophoniste Jack Walker nait de cette envie de rencontre entre le rap et le jazz. Le groupe publie deux albums, You Figure Out en 2004 et The Life We Chose en 2006, tous les deux parus chez HyenaRecords.
Ce sont pour la plupart des titres du dernier album qu’interprétait le groupe ce soir.

Un premier set énergique d’une heure a vu le groupe interpréter les morceaux Casket ou Ill Bizz, puis un second set ou l'on a pu entendre un très dansant Circus, la reprise hip-hop du Kashmir de Led Zeppelin et le morceau titre The Life We Chose avant de conclure sur une jam reggae ou Maddox a changé sa veste d’human beatbox pour celle de chanteur nu soul.

On ne peut pas reprocher grand-chose à Napoleon Maddox, excellent showman et personnalité remarquable. Mais il a semblé manqué un petit quelque chose à l’ensemble. Cocheme’a Gastelum a pris les solos les plus intéressants tandis que Oliver Lake se tenait un peu en retrait. Le batteur Benjamin Sanz, qui remplacait au pied levé Hamid Drake, a fait le boulot malgré une tendance au passage en force qui aurait pu à quelques reprises etre évité.
C’est le contrebassiste Joe Fonda qui fut le plus impressionnant, explosif, communicatif dans son plaisir de jouer. C’est incontestablement lui qui tenait la barre de IsWhat ?! lors de ce concert, assurémént le plus « pop » du festival.

14/11/2007

JAZZDOR EP.01 - DAS KAPITAL / WONDERLAND (13/11/2007)

C'est avec le projet Wonderland que débutait mardi 13 novembre à 22heures la série de concerts "en club" du festival Jazzdor de Strasbourg, au Hall des Chars-Laiterie.

Deux rencontres préalables avec le public avaient permis aux membres du groupe d’expliquer le dispositif de cette «création nomade». Les cinéastes Martin Otter et Nicolas Humbert (auteur des films «Step Across The Border», «In The Middle of The Moment», «3 Windows») filment des images dans la ville du concert les jours qui précèdent celui-çi. Ils montent ensuite un film diffusé pendant le concert sur deux écrans entourant sur scène les membres du trio Das Kapital, Edward Perraud à la batterie, Hasse Poulsen à la guitare et Daniel Erdmann aux saxophones.

Il a semblé se dessiner pendant le concert deux parties plus ou moins distinctes. Une première ou les images accompagnaient une musique pleine d’inventivité mélodique, pendant que sur les écrans on pouvait suivre des personnages marchant dans les rues de la ville. Puis une seconde ou la musique s’est presque «effacée» mélodiquement au profit des images et d'un chaos musical progressif.

Les musiciens avaient auparavant présenté Nicolas Humbert comme un «poète de l’image». On n’aurait pu trouver terme plus exact tant ce que l’on a vu sur les deux écrans pendant le concert s’est révélé merveilleux. Autant la première partie du film était urbaine, souvent nocturne mais toujours civilisée, autant la seconde fut une véritable plongée au cœur de la nuit, où rêves et cauchemars ne formaient plus qu’un seul et même songe. Danse macabre, automates squelettiques désarticulés filmés en mouvement. Le travail effectué par Nicolas Humbert et Martin Otter, en quelques jours pour filmer et en quelques heures pour monter, a touché au sublime.
Dans les regards et les mouvements des personnages-objets qu’on observait sur les images diffusées, il y avait tout ce qui se passait au meme moment entre les trois musiciens sur scène. Le lyrisme grave du saxophoniste Daniel Erdmann et la douceur amplifiée du guitariste Hasse Poulsen entouraient le superbe batteur Edward Perraud dont la palette d’idées de sons et de rythmes a magnifiquement souligné toutes les atmosphères imaginables.
Trois musiciens formidables, aussi agréables et intelligents dans la vie qu’inventifs sur scène.

Ne passez pas à coté du projet Wonderland s'il passe près de chez vous et vous plongerez dans un «monde merveilleux». Une manière idéale de se rappeler que "l'art, c'est là ou l'on est"...
En lien, les sites de Das Kapital et de ses musiciens, ainsi que celui du cinéaste Nicolas Humbert.

JAZZDOR EP.00 - JAMES BLOOD ULMER (08/11/2007)

Jazzdor avant l’heure.

Pour commencer ce 22ème festival Jazzdor, James Blood Ulmer se produisait au Conservatoire de Strasbourg, jeudi 8 novembre 2007, accompagné d’un jeune quatuor à cordes.
Le guitariste et chanteur américain a surtout tricoté à la guitare (l'harmolodie ?!!) sur des pièces agréables à entendre et bien interprétées par les cordes, mais au final assez anecdotiques.
Le moment fort du concert aura été l'unique blues, Maya ou la voix de Ulmer, doublée au début des couplets par le violoncelle, était poignante. "Maya, take me higher"...

On parlait récemment du disque de Robert Plant et de Alison Krauss produit par T-Bone Burnett.
On retrouve la chanteuse et violoniste country derrière James Blood Ulmer sur la très belle captation d’un concert hommage au blues, produit et présenté par Martin Scorsese, Lightning In a Bottle.
Le genre de soirée comme les Américains savent si bien en faire : Spectacle impeccable et musique géniale.
Krauss accompagne donc Ulmer sur un magnifique Sittin On The Top The World de Mississippi Sheiks.

http://www.youtube.com/watch?v=VmqI2QTknO8

Mavis Staples est, comme sur son dernier disque We'll Never Turn Back (Anti,2007), impressionante sur See That My Grave Is Kept Clean de Skip Johnson.
Sinon on peut y voir et entendre Angelique Kidjo, India Arie, Clarence Gatemouth Brown, Steven Tyler et Joe Perry du groupe Aerosmith, qui n’ont pas pris une ride depuis dix ou vingt ans, Keb’Mo, Ruth Brown, Macy Gray, les Neville Brothers ainsi que l’impayable Solomon Burke, toujours sur son trone !

Pour en revenir à James Blood Ulmer, deux disques récents sont particulièrement recommandables, tous deux parus chez Hyena Records : Memphis Blood-The Sun Sessions (2001) ou il reprend quelques standards tels Spoonful, I Just Want To Make Love To You ou I Want To Be Loved ainsi que son dernier disque Bad Blood In The City-The Piety Street Sessions (2007), produit par Vernon Reid, guitariste du groupe Living Colour. L'heure n’est pas à la rigolade comme l’indique le titre qui ouvre le disque, Survivors of The Hurricane. La suite est dans la meme veine : Katrina, This Land Is Nobody’s Land, Dead Presidents et pour finir Old Slave Master. Ulmer règle ses comptes avec la gestion gouvernementale de la catastrophe Katrina à la Nouvelle-Orléans. La musique est superbe, particulièrement sur les blues lents comme Katrina, This Land Is Nobody’s Land, Grinnin’ In Your Face et Backwater Blues quand certains titres plus rapides ne sont pas dénués d’humour (Let’s Talk About Jesus ou Dead Presidents).

25/10/2007

NOSTALGIE

L’autre soir en regardant sur l’excellent site « Ubuweb » une interview de William Burroughs par Frédéric Mitterrand, en 1990, à la télévision (publique?). Il y a 17 ans donc, une émission d’une heure avec l’un des plus grands écrivains américains parlant morphine et répondant à Mitterrand que « non, pour ce jeune homme à Tanger, il n’y avait vraiment aucune attirance intellectuelle » !
Tout cela ponctué de prestations musicales, la chanteuse Helen Merrill pour Round Midnight accompagnée par le pianiste Alain Jean-Marie ainsi que Steve Lacy pour un idéal Naked Lunch. Et le présentateur de préciser que ce dernier en est à son troisième passage dans l’émission, bah tiens donc !
Voila, c’était il y a 17 ans à la télévision française… comme le temps passe !

01/10/2007

SPRINGSTEEN, BRUCE, PATTI, PAMELA, ...

Ces jours-ci, la famille Springsteen est aux affaires.

Ce matin sur France Inter, l’horrible Magic était présenté comme un excellent disque faisant suite à, je cite, «l’interprétation en solo des chansons du chanteur folk Pete Seeger ». Au moins ce dernier était vraiment un chanteur folk car pour le reste des infos du jour, on est assez loin du compte! On peut largement éviter Magic qui débute par l’improbable rencontre entre Renaud et Pearl Jam sur Radio Nowhere. Mal produit, manquant de finesse, oubliez ça et procurez vous les excellents disques de Springsteen consacrés à Pete Seeger.

L’album studio We Shall Overcome, The Pete Seeger Sessions n’est pas un disque solo puisque c’est plutôt l’idée de réunir des amis dans le but d’intérpréter les morceaux de Seeger dans une ambiance familiale qui est à la base du projet. En tout cas le disque est réussi, et des morceaux comme Keep Your Eyes On The Prize ou Mary Won’t You Weep sont réjouissants. Le Live in Dublin documentant la tournée du disque est encore meilleur, l’énergie de Springsteen et la qualité des musiciens présents sur le projet faisant de cet album le meilleur du Boss. Les mêmes morceaux que précédemment cités sont joués avec une joie communicative et la relecture d’Atlantic City par exemple est superbe. Soulignons que sur Eyes on The Prize, c’est Mark Anthony Thompson (Chocolate Genius) qui prend le micro pendant une partie de la chanson.

Patti Scialfa, femme de Bruce, qui participait à l’aventure de ces Seeger Sessions s’en sort beaucoup mieux avec Play It As It Lays (ColumbiaRecords) qui a ses bons moments comme le très beau et très soul Play Around. Si L’ensemble souffre d’un son de batterie un peu clinquant, Scialfa chante très bien, d’une voix qui rappelle énormément celle de Marianne Faithful. On est en excellente compagnie sur des titres comme Rainy Day Man ou Run Run Run, Patti Scialfa s’avére en tout cas etre cet automne beaucoup plus fréquentable (en tout bien tout honneur) que son mari.

Le mari, la femme, ...la sœur.

C’est Pamela Springsteen qui signe la photo illustrant le disque de Robert Plant et de Alison Krauss, produit par T-Bone Burnett.
Raising Sand est la rencontre entre le vieux chanteur anglais de Led Zeppelin et la beaucoup plus jeune chanteuse de country américaine.
Plant n’a jamais aussi bien chanté, la production « blues 4 étoiles » de Burnett est superbe et on est soufflé dès Rich Woman qui ouvre le disque et ou tout semble flottant, aérien. Après le magnifique Thunderbird de Cassandra Wilson et son propre True False Identity, T-Bone Burnett devient le créateur officieux du blues du XXIème siècle. Casting de musiciens parfaits (Marc Ribot à la guitare comme sur les deux disques pré-cités) et ce son, spatial, large, cotonneux.
Alors peut-être qu’un peu plus de folie n’aurait pas nuit au disque. Mais entendre Plant nous redonner la chair de poule sur Nothin’ et Fortune Teller comme à l’époque de Led Zeppelin sur Since I’ve Been Loving You nous donne l'envie de rêver à un disque de blues avec Marc Ribot. Pour se faire une idée, écoutez 21 Years, superbe duo entre Plant et le défunt guitariste Rainer Ptacek sur l'album hommage à ce dernier, The Inner Flame (Atlantic/WE, 1997). Magique.
Affaire à suivre donc…

15/09/2007

JOE HENRY - CIVILIANS (Anti, 2007)



Plus accessible et moins dense que les précédents Scar (Mammoth, 2001) et Tiny Voices (Anti, 2003), deux des plus grands disques parus ces dernières années, Civilians, le nouveau disque de Joe Henry est assez décevant. Dans les interventions des musiciens, la qualité de la production (Joe Henry, Craig Street) et celle du songwriting de Henry, se trouvait la quasi-perfection des deux disques précédents. Ici, ces détails qui habitaient le bien nommé Tiny Voices ont quasiment disparu au profit d'un accompagnement de mandoline assez fatiguant sur plusieurs titres.
Vous voudrez bien d'un autre coupable ? Si de la guitare de Bill Frisell s'échappent des notes toujours magnifique, il semble en retrait(e?!) sur ce disque et sa contribution aux albums de différents chanteurs folks américains ces dernières années n 'est pas toujours d'un interet majeur. Les derniers à avoir profité du talent de Frisell étant Vic Chesnutt sur Ghetto Bells (NewWest, 2005) (le morceau Forthright notamment) et Lucinda Williams sur "West" (LostHighway,2007).
Mais revenons à Civilians. La chanson titre qui ouvre l’album est, malgré une intro très "Madeleine Peyroux» plutôt pas mal. Suit Parker’s Mood à laquelle on préfèrera le morceau de Charlie Parker, puis Civil War, un peu indigeste.
On croit tenir quelque chose avec Time Is a Lion et son intro bluesy, mais on est vite refroidi par un refrain qui manque réellement de finesse.
You Can’t Fail Me Now me plait aussi peu que la version de Loudon Wainwright III sur son dernier disque Strange Weirdos et qui est d’ailleurs à peu de choses près la même (le même morceau et les mêmes musiciens, forcément...).
Pour les meilleurs moments, on écoutera Scare Me To Death, Our Song, le superbe Love Is Enough, et I Will Write My Book avec Van Dyke Parks au piano. God Only Knows termine le disque sur une note sombre mais superbe. On soulignera sur ce dernier titre le très bel accompagnement du batteur Jay Bellerose, formidable tout au long de l'album. Malheureusement, c'est souvent trop long, trop lent, comme sur Wave ou Shut Me Up et l’on sort du disque fatigué par l'accompagnement de Greg Leisz à la mandoline.
Dans une interview, on peut lire Joe Henry s'exprimer sur la magnifique photo de John Cohen qui illustre le disque : « on ne sait pas si la fille se dirige vers un mariage ou un enterrement ». C’est un peu le sentiment qu’on a après Civilians. Ni totalement déçu, ni vraiment enthousiasmé, on continuera encore un peu la route, histoire de voir...
Et l'on verra Joe Henry interpréter les chansons de Civilians dans l'émission "Morning Becomes Eclectic" sur la radio de Los Angeles KCRW.
Taper "Joe Henry" dans le moteur de recherche de l'émission et comparer avec sa prestation en 2003 pour l'album Tiny Voices.
Au plaisir.

13/09/2007

TOUT LE MONDE EN PARLE, Fred Neil

Spadee Sam presents - Shake Sugaree, a Fred Neil Mix (clique gauche pour l'audio)

01 - Fred Neil - Everybody's Talking
02 - Fred Neil - Green Rocky Road
03 - Fred Neil - That's The Bag I'm In
04 - Fred Neil - Come Back Baby
05 - Fred Neil - Prettiest Train
06 - Fred Neil - Please send me Someone to Love
07 - Fred Neil - Faretheewell
08 - Tim Buckley - Dolphins
09 - Mark Lanegan - Ba-dee-da
10 - Sid Selvidge - Shake Sugaree
11 - Elizabeth Cotten - Shake Sugaree

Dans « Le Monde » du 26 juillet 2007, la journaliste Véronique Mortaigne rendait compte du concert de Joe Sample, et de la chanteuse Randy Crawford, au festival de jazz de Nice. Cette dernière y interprétait Everybody’s Talking qui, d’après l’auteur de l’article, est signée Harry Nilsson.
Rendons à César ce qui lui appartient, c’est Fred Neil qui compose et chante Everybody’s Talking en 1966, sur l’album Fred Neil (Capitol).

Si l’envie vous prend de découvrir cet extraordinaire chanteur, procurez vous l’excellent double disque The Many Sides of Fred Neil paru en 1998 chez Collector’s Choice Music, sous-division d’EMI.
On y trouve les albums Fred Neil donc, mais aussi Sessions paru en 1967, ainsi que Other Side of This Life, album live de 1971. Quelques enregistrements inédits complètent le second disque.

Si The Dolphins, Everybody’s Talking ou That’s The Bag I’m In sont les meilleures chansons de Fred Neil, Faretheewell (Fred’s Tune)» et «Cynicrustpetefredjohn Raga» sont celles qui retiendront notre attention sur ce premier album. Faretheewell, composée par John et Alan Lomax, c’est un peu Johnny Cash chanteur de soul sudiste qui nous raconterait qu’ « autour de son cœur, tout n’est que douleur ». Merveilleux.
La seconde est une jam-ragga orientale avec entre autre l’harmoniciste Al Wilson (du groupe Canned Heat), et qui n’a rien à voir avec tout ce qui lui précède sur le disque.
Mais c’est assez normal pour Neil. Comme Tim Buckley, son plus grand disciple, Fred Neil semble en permanence vouloir dire « Vous êtes bien gentils, je vous ai chanté de jolies chansons, on va pouvoir maintenant faire un peu de musique ». Et quand on les laisse faire Neil ou Buckley père, ne pas s’attendre à des tubes radio.
Sessions débute avec Please Send me Someone to Love du chanteur Percy Mayfield, un blues extraordinaire ou la voix de Neil se bat en duel avec la contrebasse. Montez les basses à fond et tremblez.
Mieux ne vaut pas être seul en pleine nuit pour écouter Merry Go Round et Look Over Yonder. Difficile de faire moins drôle, mais cette voix mes amis, six pieds sous terre, du blues ni noir ni blanc, juste du blues. Ses « hmm hmm » ponctuant les solos de guitares sont vraiment impressionnants de gravité.
Ces Sessions se terminent par les énergiques Looks Like Rain et Roll On Rosie, deux jams sous caféine, ou l’ambiance semble être bien détendue en cette heure qu’on devine tardive. La voix de Neil est au sommet en crooner folk-blues menant là ou il le souhaite sa petite équipe.

Other Side of This Life est un concert de 1971 et débute tranquillement par la chanson titre avant que Neil ne mette la gomme sur Roll on Rosie et s’impose en roi du cool sur That’s The Bag I’m In, Prettiest Train ainsi que Come Back Baby sur laquelle il est accompagné par le pianiste Les McCann. Trois morceaux ou l’interprétation de Neil atteint des sommets. Ba-De-Da voit le retour de son premier partenaire discographique, le chanteur Vince Martin, tandis que sur le sombre Ya Don’t Miss Your Water c’est l’ange noir de la country Gram Parsons qui vient pousser la chansonnette.

Parmi les quelques inédits de fin de disque, December’s Dream est une curiosité, Neil se faisant beaucoup plus sérieux qu’à l’accoutumé sur cette jolie chanson, au point qu’il est difficile de reconnaître sa voix.
Enfin, How Long Blues-Drown In Tears, longue jam blues, renoue avec la veine des Sessions.

Au chapitre héritiers, on notera le Ba-di de Mark Lanegan sur l’excellent I’ll Take Care of you son album de reprises paru en 1999 chez SubPop et sommet de sa discographie, surtout au vue de ses douteuses et récentes collaborations, du genre Isobel Campbell et Soulsavers. Pas d’électro d’ascenseur ou de tapisserie vocale féminine mais de la soul et du blues sec.
En 1968 c’est le chanteur de soul Al Wilson (pas l’harmoniciste de Canned Heat) qui reprend The Dolphins sur Searching for the Dolphins (SoulCity), dont le titre annonce la couleur. Voix hésitante sur des arrangements luxuriants et pompiers, on s’en passera facilement.
Et Tim Buckley ? Avouons-le, la version studio de Dolphins, sur l’album Sefronia (ManifestoRecords) n’est pas terrible. Ca sent déjà le sapin pour Tim.
En revanche la première version live sur le merveilleux Dream Letter, Live in London 1968(ManifestoRecords) est splendide. 12 cordes, guitare électrique, vibraphone et contrebasse accompagnent la voix divine de Tim Buckley qui survole ce morceau pas facile à chanter (« I’ve been searching for the dolphins in the sea … »)
Sid Selvidge, sur The Cold of The Morning (PeabodyRecords, 1972) s’essaye à une imitation de Fred Neil sur I’ve Got a Secret (didn’t We Shake Sugaree) de Elizabeth Cotten. Produit par Jim Dickinson (Sister Lovers de Big Star entre autres), l’ombre de Neil plane tout au long de cet album de reprises comme on les jouait dans les Coffe House de Greenwich Village ou ce dernier était un modèle pour tous les débutants de la scène folk (pour plus d’explications, lire les Chronicles de Bob Dylan…).
On pouvait aussi y voir et entendre le chanteur et guitariste Kenny Rankin qui, quelques mois auparavant, accompagnait Dylan à la guitare sur le morceau Subterranean Homesick Blues et qui en 1967 sortait Mind Dusters (VividSound), son premier disque sur lequel il s'attaquait lui aussi à The Dolphins, plutôt correctement pour être honnête.
C’était une autre époque. Depuis, Fred Neil s’est retiré des affaires courantes, s’occupant en Floride de sa grande passion, les dauphins, avant de s’éteindre définitivement en 2001.

Pour la discographie complète de Neil, voici un lien qui devrait vous satisfaire :

Et comme il le chantait,

« Tout le monde me parle mais je n’entend personne,
Juste les échos de mon esprit… »
(« Everybody’s Talkin’)
Bon voyage ...

08/09/2007

PLAT DU JOUR 1 - Tony Bennett, Stevie Wonder, Chris Whitley, Joe Henry, Jim White, Meshell Ndegeocello, Reverend Beat-Man, Tav Falco, Jon Spencer


Un formidable duo entre Tony Bennett et Stevie Wonder sur For Once in my Life que l’on peut voir sur YouTube. Les deux chanteurs sont extraordinaires avec Stevie Wonder dont la voix est au choix géniale ou éxaspérante, et celle de Tony Bennett, plus douce à chaque écoute.Sur d’autres vidéos moins récentes, on peut le voir interpréter ce meme morceau et c’est à chaque fois un régal.
Un autre morceau ou Bennett est au sommet c’est Poor Little Rich Girl avec l’orchestre de Count Basie, sur l'album Basie Swings, Bennett Sings (Strike Up The Band) chez BlueNote en 1958. La grande classe.

Dans le hors-série des Inrockuptibles consacré à Bob Dylan, à aucun moment il n'est fait mention de Chris Whitley. Pourtant, 4th Time Around sur son disque de reprises Perfect Day (Cargo,2000) est sans doute l’une des plus belles choses qu’on ait faite avec une chanson de Dylan. En trio avec Chris Wood à la contrebasse et Billy Martin à la batterie (du trio new-yorkais Medeski, Martin and Wood), c’est une petite merveille tout en réserve et douceur.
Sur Dislocation Blues (Rounder,2007), album posthume en collaboration avec Jeff Lang, The Road Leads Down, chanté par ce dernier, est dans le meme registre. Au casque, écoutez l'accompagnement vocal de Whitley qui double la voix de l'Australien. Les deux musiciens reprennent aussi superbement When I Paint my Masterpiece et Changing The Guards de Dylan.
J'essaierai de revenir bientot sur l'ensemble de son oeuvre mais en attendant, si vous croisez les disques Hotel Vast Horizon ou Soft Dangerous Shores dans le rayon d'un disquaire, Dieu vous en voudrait probablement d'hésiter plus que nécessaire! Comment a-t-on pu passer tellement à coté d'un tel artiste ?

Joe Henry, Jim White, Meshell Ndegeocello, trois demi-déceptions pour cette rentrée. Forcément, après deux chef-d’œuvres (Scar et Tiny Voices) pour Henry, un (Drill a Hole in That Substrate…) pour White et deux bons albums qui en suivait un troisième sublime ( Cookie,The Anthropological Mixtape) pour la chanteuse et bassiste, cela devait arriver. Par rapport à ces disques, Civilians de Joe Henry, Transnormal Skiperoo de Jim White et The World Has Made me The Man of My Dreams de Meshell Ndegeocello sont donc forcément décevants.
J'en reparlerai plus en détails prochainement.

On peut télécharger un morceau du nouvel album de Reverend Beat-Man sur le site du label suisse VodooRythm. La géniale The Clown of a Town a tout de la chanson parfaite. Poursuivez avec Lie to Me, qui ouvre le dernier Tom Waits, notamment la version avec le guitariste Duke Robillard, sur le plateau du Letterman Show, et disponible sur YouTube.
Ecoutez ensuite les disques de Tav Falco’s Panther Burns, inégaux certes mais ou se cachent quelques pépites, puis le nouvel album de Jon Spencer avec son groupe Heavy Trash. Going Out West with Heavy Trash est excellent et redonnera le sourire pour la rentrée.
Ca devrait etre pas mal…